Troubles de l’équilibre acido-basique
Cours d'urologie
Physiologie de l’équilibre acide-base
:
La concentration des protons (H+) normalement de
40 nmol/L de liquide extracellulaire et 100 nmol/L de
liquide intracellulaire est régulée de façon extrêmement
précise malgré la génération d’environ 1 mmol/kg/j de
protons, c’est-à-dire 70 millions de nmol de protons par
jour.
Ces protons générés quotidiennement proviennent
pour partie de l’acide sulfurique non volatil (25 mmol)
provenant du catabolisme des protéines soufrées alimentaires,
d’acides organiques non métabolisés (pour
environ 40 mmol).
A - Régulation de la balance acide-base
:
Elle est est assurée :
• à court terme (quelques minutes) par le tamponnement
par les liquides intracellulaires, essentiellement
l’os minéral et le muscle squelettique.
Ceux-ci captent
environ 60 % de la charge acide ;
• à moyen terme, les protons sont éliminés par l’adaptation ventilatoire.
Si la charge acide est suffisamment
importante, la ventilation est stimulée en quelques minutes, principalement par une augmentation du
volume ventilatoire (respiration de Kussmaul).
La
ventilation permet d’éliminer les protons sous forme
de gaz carbonique CO2 pulmonaire suivant la réaction :
protons + HCO3- = H2O + CO2.
Cette élimination de
protons par la ventilation se fait au prix de la consommation
d’un ion bicarbonate qui devra être régénéré
par le rein ;
• à plus long terme (quelques heures), le rein assure la
régénération des bicarbonates HCO3- consommés.
La balance acide-base est habituellement décrite par
l’équation de Henderson-Hasselbalch dans laquelle la
concentration de H+ est exprimée sous la forme de son
antilogarithme, le pH, notion complexe et peu pratique à
l’usage.
Le bilan acide-base peut être décrit plus simplement
et tout aussi complètement par l’équation simplifiée :
[H+] = 23,9 x PCO2 / [HCO3–]
Dans cette équation [H+], la concentration en protons est
exprimée en nmol/L.
PCO2 (la pression partielle du CO2
en mmHg) représente le facteur ventilatoire et HCO3
(concentration plasmatique de bicarbonate en mmol/L)
est le facteur rénal.
La concentration en protons de l’organisme dépend
essentiellement du rapport PCO2/[HCO3-] et toute
modification de l’un de ces facteurs entraîne une
compensation respiratoire ou rénale de l’autre terme
pour essayer de normaliser la concentration de protons.
Ces réponses sont en partie médiées par des modifications
parallèles de la concentration en protons des cellules
régulatrices au niveau du tubule rénal ou des centres
respiratoires.
Ainsi, le maintien d’une concentration de
protons nécessite une réponse compensatoire qui varie
dans la même direction que le désordre primitif.
Par
exemple, au cours de l’acidose métabolique, la ventilation
augmente, aboutissant à une chute de la PCO2 qui tend à
diminuer la concentration de protons.
Cette réponse
débute dès la première heure et se complète en 12 à 24 h.
B - Rôle du rein
:
Le rein régule le bilan acide de l’organisme en régénérant
environ 70 mmol/j de bicarbonates, cela par 2 mécanismes
principaux :
• la réabsorption des bicarbonates filtrés dans le tube
proximal (85 %) et dans la branche ascendante large
de l’anse de Henle (10 %) ;
• la synthèse de novo de bicarbonates : dans le tube
collecteur, les protons sécrétés dans la lumière sont
titrés par des tampons (essentiellement phosphate et
ammoniaque) ce qui permet aux cellules de générer du
bicarbonate.
Le débit de sécrétion des protons est affecté
par de nombreux facteurs dont le pH luminal, la PCO2
systémique, les minéralocorticoïdes et la différence de
potentiel à travers le tube collecteur.
L’ammoniaque NH3 est généré dans tube proximal par
désamination de la glutamine et exporté dans la lumière
urinaire.
La production d’ammoniaque est régulée physiologiquement,
ce qui constitue un mécanisme de contrôle
supplémentaire de l’excrétion nette d’acide indépendant
du débit sécrétoire distal de protons.
Le débit de production
d’ammoniaque par néphron est augmenté par l’acidose
métabolique, la déplétion potassique, les glucocorticoïdes,
la diminution de la masse rénale fonctionnelle
et, à l’inverse, il est supprimé par l’hyperkaliémie.
En condition stable d’équilibre, la quantité nette d’acide
sécrétée et donc la génération rénale de nouveaux bicarbonates
est équivalente à la génération métabolique de
protons, ce qui préserve le bilan acido-basique.
En cas
d’accumulation nette d’acide, le rein répond en augmentant
la réabsorption de bicarbonates, en augmentant la sécrétion
de protons dans le tube distal et le tube collecteur et,
enfin, en augmentant la production d’ammoniaque, ce
qui stimule la génération rénale de bicarbonates grâce à
une augmentation de l’excrétion d’ammonium NH4+.
En condition normale, l’excrétion urinaire quotidienne
d’ammonium est d’environ 30 mmol et peut augmenter
jusqu’à 280 mmol mais cette réponse adaptative nécessite
plusieurs jours.
Acidoses métaboliques :
A - Évaluation diagnostique
:
L’évaluation d’un patient avec une diminution de la
concentration plasmatique de bicarbonate doit commencer
par la réalisation de gaz du sang artériel pour exclure
une hyperventilation primitive.
L’acidose métabolique
est définie par une augmentation de la concentration des
protons > 42 nmol/L ou un abaissement du pH < 7,38.
L’acidose est dite « métabolique » si la concentration
plasmatique de bicarbonate est < 22 mmol/L.
La PCO2
s’abaisse secondairement par compensation ventilatoire.
Le degré de compensation ventilatoire permet d’apprécier
la possibilité d’un trouble acido-basique complexe.
Normalement, la PCO2 diminue de 1,2 mmHg pour
chaque baisse de 1 mmol/L de la bicarbonatémie.
Si la
PCO2 est significativement plus basse ou plus élevée
que cette valeur, il faut alors suspecter respectivement
une alcalose ou une acidose respiratoire associée.
La détermination du trou anionique plasmatique est la
2e étape importante dans le diagnostic de l’acidose métabolique.
Le trou anionique (TA) plasmatique représente
la différence entre les cations et les anions mesurés :
TA = [Na] – [ Cl] – [HCO3] Les valeurs normales « classiques » du trou anionique
plasmatique sont de 7 à 13 mmol/L.
Un trou anionique
supérieur à 16 mmol/L est considéré comme significatif
et traduit la rétention d’anions indosés.
B - Diagnostic étiologique
et physiopathologique :
1- Acidoses métaboliques avec trou anionique
augmenté
:
Lorsque l’acidose est liée à l’accumulation d’un proton
combiné à un anion peu ou pas métabolisé, l’accumulation
de cet anion non mesuré augmente le trou anionique.
L’acidose est bien liée à l’accumulation de protons mais
l’anion indosé non métabolisé devient alors un outil
diagnostique précieux.
Au cours de tous ces désordres aboutissant à une acidose
métabolique avec une augmentation du trou anionique,
l’acide organique est ingéré ou généré plus rapidement
qu’il ne peut être métabolisé ou excrété, aboutissant à la
fois à une perte nette de bicarbonates et à l’accumulation
du sel de sodium de cet acide dans le plasma.
Les principales causes d’acidose métabolique avec trou
anionique élevé sont :
• l’acidose lactique habituellement liée à une hypoperfusion
systémique marquée ou un cancer ;
• l’acidocétose liée à un diabète, à l’alcool ou au
jeûne, situations au cours desquelles l’accumulation
de béta-hydroxy-butyrate est le principal anion non
mesuré ;
• l’insuffisance rénale au cours de laquelle il y a
rétention à la fois de protons et d’anions, comme les
sulfates, phosphates et l’hippurate ;
• les ingestions ou intoxications au cours desquelles
l’anion principal accumulé est le formate avec le
méthanol, le glycolate, le glyoxalate et l’oxalate avec
l’éthylène-glycol, les cétones et lactates avec l’aspirine.
Les acides cétoniques, lactates, salicylates, méthanol et
éthylène-glycol sont facilement mesurables et quantifiables
par la plupart des laboratoires cliniques.
L’ingestion
d’éthylène-glycol ou de méthanol est habituellement
associée à une augmentation du trou osmolaire plasmatique
et l’éthylène-glycol produit une cristallurie d’oxalate
de calcium.
2- Acidoses métaboliques avec trou anionique
normal (= acidoses hyperchlorémiques)
:
Dans une acidose métabolique où l’excès d’acide est
tamponné par un bicarbonate extracellulaire, le bicarbonate
est remplacé sur une base équimolaire par le chlore
et il n’y a pas de modification du trou anionique.
L’acidose métabolique est dite hyperchlorémique en raison
de l’augmentation de la concentration plasmatique de chlore.
L’acidose hyperchlorémique est une conséquence de la
rétention nette d’HCl ou d’un équivalent métabolique
(par exemple le chlorure d’ammonium et les sels chlorés
d’amino-acides) ou une perte de bicarbonate de sodium
ou son équivalent métabolique (excrétion de sel ou
d’anion organique en excès proportionnel de chlore).
Les causes rénales de perte de bicarbonate peuvent être
distinguées des causes non rénales par la mesure de l’ammoniurie.
Au cours de l’acidose hyperchlorémique,
une excrétion urinaire quotidienne d’ammonium inférieure
à 1 mmol/kg est anormale et indique que le rein
est la cause principale de cette anomalie.
Si la mesure de
l’ammoniurie n’est pas facilement disponible, celle-ci peut
être estimée à partir du trou anionique urinaire (TAU) :
TAU : UNa + UK - UCl
Un TAU > 0 signe l’origine tubulaire rénale de l’acidose
alors qu’un TAU < 0 signe l’origine extrarénale de l’acidose.
• Acidose métabolique avec augmentation de l’ammoniurie
:
– les pertes gastro-intestinales de bicarbonates à partir
d’aspiration digestive ou de diarrhée produisent une
acidose hyperchlorémique si la vitesse de perte en
bicarbonates excède les capacités de régénération
rénale des bicarbonates ;
– la génération de grandes quantités d’anions organiques
produit une acidose hyperchlorémique si l’excrétion
de l’anion est suffisamment rapide pour
empêcher son accumulation dans le plasma.
Les
principales causes comprennent l’acétonurie (par
exemple au cours de la phase de récupération d’une
acidocétose diabétique), une acidurie hippurique
provenant du métabolisme du toluène (inhalation de
colle) ou d’une acidurie D-lactate dans le syndrome
de l’anse intestinale borgne ;
– l’administration de chlorure d’ammonium ou de sel
chloré d’amino-acides produit une acidose hyperchlorémique
en raison de leur métabolisme en HCl ;
– l’administration d’autres sels chlorés peut également
produire une acidose de dilution lorsqu’il existe une
rétention franche du chlore comme par exemple au
cours d’une déplétion volémique du liquide extracellulaire,
d’une insuffisance cardiaque ou après
l’administration rapide de solutés salés isotoniques
par voie intraveineuse.
• Acidoses métaboliques avec ammoniurie abaissée
(inappropriée) : les anomalies de la régénération rénale
ou de la réabsorption de bicarbonate sont les principales
causes d’acidose hyperchlorémique avec réduction de l’excrétion urinaire
d’ammoniurie.
Ces acidoses
tubulaires rénales peuvent être distinguées sur la
base des variations du pH urinaire en réponse aux modifications
de la bicarbonatémie.
Le pH urinaire est
inférieur ou égal à 6 pour une bicarbonatémie normale à
24 mmol/L et la baisse de la bicarbonatémie induit une
réduction progressive du pH urinaire.
Acidose tubulaire proximale de type 2 : la baisse de la
réabsorption proximale de bicarbonates augmente le
débit de bicarbonate délivré dans le tube collecteur audelà
de la capacité de réabsorption de ce dernier.
Après
une bicarbonaturie initiale, la concentration plasmatique
de bicarbonate et la quantité de bicarbonate filtré diminuent
toutes deux et un nouvel état d’équilibre est atteint
en quelques heures avec une acidose hyperchlorémique
et une urine totalement dépourvue en bicarbonate.
Le
pH urinaire est généralement acide.
La suspicion d’acidose
tubulaire proximale est confirmée par l’administration
orale ou intraveineuse de bicarbonate qui montre une bicarbonaturie significative (pH urinaire > 6,5) en
présence d’une concentration plasmatique de bicarbonate
abaissée < 22 mmol/L, témoin d’un seuil réduit de
réabsorption du bicarbonate.
La mesure de la fraction
d’excrétion de bicarbonate permet de confirmer le diagnostic
d’acidose tubulaire proximale.
L’acidose tubulaire proximale peut survenir comme une
anomalie isolée du transport du bicarbonate.
Le plus
souvent cependant, l’acidose tubulaire proximale survient
dans le cadre d’un syndrome de Fanconi associant
plusieurs anomalies de transport dans le tube proximal
(phosphaturie, glycosurie, amino-acidurie).
Chez l’adulte,
l’acidose tubulaire proximale peut être causée par un
myélome à chaînes légères, des toxiques rénaux, un traitement
par un inhibiteur de l’anhydrase carbonique
(acétazolamide).
Chez l’enfant, les maladies génétiques
(cystinose) et la chimiothérapie par ifosfamide sont les
plus fréquentes.
Acidose tubulaire distale de type 1 : dans cette forme
d’acidose tubulaire, la sécrétion de protons dans le tube
collecteur et (ou) la capacité à abaisser le pH urinaire
sont altérées.
Le pH urinaire ne peut diminuer en dessous
de 5 même en présence d’une acidose métabolique
sévère.
Le gradient de PCO2 (iPCO2) entre l’urine et le
sang dans une urine alcaline (qui représente un index de
sécrétion de proton dans le tube collecteur) est souvent
anormal.
Plusieurs sous-types d’acidose tubulaire distale ont été
identifiés.
Certains patients ont un tube collecteur excessivement
perméable aux protons (défaut de gradient ou de perméabilité)
comme c’est le cas au cours de l’administration
d’amphotéricine B avec une PCO2 urinaire normale
dans une urine alcaline.
Chez les patients avec un débit sécrétoire de protons
anormalement bas (défaut sécrétoire), la PCO2 urinaire
est anormalement basse.
Cette forme est généralement
associée à une hypokaliémie sévère car la réabsorption
de sodium dans le tube collecteur s’accompagne d’une
sécrétion de potassium plutôt que celle de protons.
Les principales causes de ces anomalies sont le déficit en anhydrase carbonique de type 2, les mutations du gène
codant la protéine de transport anionique AE1 et des
défauts de la proton-ATPase du tube collecteur (comme
au cours du syndrome de Sjögren).
Les patients ayant une différence de potentiel anormalement
basse dans le tube collecteur (défaut de potentiel)
ont aussi une PCO2 urinaire basse mais la kaliémie
est habituellement normale, voire élevée et l’excrétion
urinaire de potassium reste basse après administration
de furosémide.
L’acidose tubulaire distale par défaut de
potentiel est observée au cours des obstructions de
l’arbre urinaire, des néphropathies interstitielles associées
au lupus érythémateux et, surtout, avec l’administration
de diurétiques dits épargneurs du potassium (amiloride
ou triamtérène).
Dans la forme incomplète d’acidose tubulaire distale, la
capacité maximale d’acidification de l’urine est altérée
alors que la concentration plasmatique de bicarbonates
reste normale.
Ces patients se présentent cliniquement
avec des lithiases urinaires et (ou) une néphrocalcinose.
Cela est dû au pH urinaire alcalin, à l’hypercalciurie
secondaire à l’acidose (résorption du calcium osseux
avec ostéopénie) et à une concentration urinaire abaissée
de citrate, le citrate étant un important inhibiteur de la
cristallisation d’oxalate de calcium dans l’urine.
Ammoniogenèse défectueuse (acidose tubulaire distale
hyperkaliémique de type 4) : une production insuffisante
d’ammoniaque induit une acidose tubulaire de type 4.
La capacité à réabsorber le bicarbonate et à acidifier
l’urine est préservée mais la quantité d’acide excrétée
est réduite en raison d’une insuffisance de tampon.
Ces
formes sont cliniquement caractérisées par la présence
d’une hyperkaliémie persistante et d’une acidose métabolique hyperchlorémique modérée en rapport habituellement
avec un hypoaldostéronisme dont les principales
causes sont un déficit primitif en aldostérone (insuffisance
surrénale, traitement par inhibiteur de l’enzyme
de conversion ou par héparine), un hypoaldostéronisme
secondaire à un hyporéninisme (néphropathie diabétique, tous les anti-inflammatoires non stéroïdiens, infection
par le virus de l’immunodéficience humaine) ou encore
une résistance à l’effet tubulaire de l’aldostérone (les
médicaments bloqueurs du canal sodium épithélial du
tube collecteur comme l’amiloride, le triméthoprime à
forte dose et les anti-aldostérones comme la spirolactone).
La plupart des patients n’ont habituellement qu’une
diminution modérée de la concentration ou de l’effet de
l’aldostérone si bien que le développement d’une hyperkaliémie
nécessite habituellement la présence conjointe
d’une insuffisance rénale.
L’ammoniogenèse peut être altérée par la suppression
physiologique de l’hyperkaliémie ou de l’insuffisance
en glucocorticoïde.
L’hyperkaliémie déprime la production
rénale d’ammoniaque.
L’acidose tubulaire de type 4 au
cours de l’insuffisance en minéralocorticoïde (hypoaldostéronisme)
provient de la suppression de la production
d’ammoniaque par l’hyperkaliémie.
Les glucocorticoïdes
sont nécessaires à la fois à l’augmentation
du catabolisme protéique musculaire squelettique, à la
synthèse de la glutamine (substrat de l’ammoniogenèse)
et à la stimulation de l’ammoniogenèse rénale observée
au cours de l’acidose métabolique.
La perte d’une masse
rénale fonctionnelle suffisante altère l’ammoniogenèse
en diminuant le nombre de cellules tubulaires proximales
générant l’ammoniaque.
L’acidose tubulaire de type 4 n’est
habituellement observée que lorsque 70 à 80 % des
néphrons sont détruits.
Dans certaines maladies rénales,
notamment les obstructions de l’appareil urinaire, la
production rénale d’ammoniaque est déprimée même
s’il n’y a pas de perte substantielle de la masse fonctionnelle
rénale.
Dans ce cas, les anomalies de l’architecture tubulo-interstitielle du néphron altèrent la capacité de
réabsorption du NH3 dans l’anse de Henle et son
accumulation dans la médullaire rénale.
C - Traitement
:
1- Acidoses métaboliques aiguës
:
L’acidose métabolique aiguë sévère (définie par un
pH < 7,10 et une bicarbonatémie < 8 mmol/L en présence
d’une compensation respiratoire adéquate) est une situation
grave mettant en jeu le pronostic vital en raison de multiples
complications (insensibilité aux catécholamines,
diminution de la contractilité cardiaque, diminution des
débits cardiaques et tissulaires, sensibilisation aux
arythmies ventriculaires, inhibition du métabolisme
cellulaire, confusion et coma).
Pour les acidoses métaboliques par excès d’acides inorganiques
(acidoses hyperchlorémiques et acidoses par
intoxication), avec ou sans insuffisance rénale sousjacente,
le traitement fait généralement appel à l’administration
exogène de bicarbonate de sodium et à la
correction de la cause lorsque cela est possible.
L’administration de bicarbonate dans le traitement des
acidoses métaboliques par excès d’acides organiques est
plus controversée.
La controverse tient au fait que
l’anion organique accumulé est rapidement oxydé en bicarbonate lorsque la cause de l’acidose est corrigée.
Les risques d’une « surcorrection » par du bicarbonate
de sodium sont la survenue d’une alcalose métabolique
« rebond », l’élévation de la PCO2 tissulaire et, enfin,
l’hypernatrémie et la surcharge hydrosodée chez des
patients avec une insuffisance cardiaque ou rénale sousjacente
(auquel cas un traitement diurétique et [ou] une
hémofiltration peuvent être nécessaires).
Le bicarbonate de sodium doit être administré en perfusion
intraveineuse.
La quantité de bicarbonate est calculée
sur la base du déficit en bicarbonate et du volume de
distribution présumé :
quantité HCO3 en mmol = i [HCO3-] x 0,5 x PDC (en kg).
L’objectif est de remonter rapidement le pH sanguin
au-dessus de 7,20 et la bicarbonatémie au-dessus de
10 mmol/L.
2- Acidoses chroniques
:
Le traitement de ces acidoses chroniques d’origine rénale
est impératif afin de prévenir ou de corriger la fonte
musculaire (la protéolyse musculaire est stimulée par
l’acidose métabolique et l’hypercortisolisme résultant),
la lithiase rénale ou la néphrocalcinose, la déminéralisation
osseuse et, chez l’enfant, le retard de croissance.
Le
traitement fait appel à l’administration de sels alcalins
(bicarbonate ou citrate) de sodium ou de potassium
selon le mécanisme de l’acidose.
Alcaloses métaboliques
:
L’alcalose métabolique est définie par une augmentation
du pH artériel > 7,42 (ou une diminution de la concentration
plasmatique de proton < 38 nmol/L).
L’alcalose
est dite métabolique lorsque la concentration plasmatique
de bicarbonate est augmentée > 27 mmol/L.
A - Mécanismes
:
Dans l’homéostasie acide-base normale, 2 facteurs
interviennent dans la défense contre l’alcalose métabolique
: l’élimination rénale de bicarbonate et la production
métabolique d’acide non volatil.
Le rein normal
possède une capacité extraordinaire à éliminer de
grandes quantités de bicarbonate.
Même lorsque 100%
du bicarbonate filtré est réabsorbé, la production d’acide
métabolique (alimentaire et endogène) consomme environ
1 mmol de bicarbonate par kg de poids et par jour.
La
génération d’une alcalose métabolique nécessite donc à
la fois une augmentation de l’addition d’alcalins (génération
de bicarbonates) au liquide extracellulaire et une
altération de l’excrétion rénale de bicarbonate (maintien
de l’alcalose).
1- Addition d’alcalins
:
L’addition d’alcalins peut provenir de sources extrarénales
ou du rein lui-même.
Les sources extrarénales comprennent la perte de liquide
gastrique riche en HCl par des vomissements ou une
aspiration naso-gastrique (les pertes d’HCl sont équivalentes
à l’addition de bicarbonate) ou l’administration
directe, orale ou parentérale, d’alcalins.
La génération excessive d’alcalins par le rein au niveau
du tube collecteur survient en réponse à :
– l’élévation prolongée de la PCO2 ;
– une augmentation de l’activité minéralocorticoïde ;
– une augmentation de l’apport de sodium au tube
collecteur ;
– un déficit en potassium ;
– un apport d’anions imperméants au tube collecteur.
Les minéralocorticoïdes, l’apport de sodium et les
anions imperméants augmentent tous l’acidification
dans le tube collecteur en augmentant la réabsorption de
sodium et en augmentant le potentiel luminal électronégatif.
Les minéralocorticoïdes stimulent également
directement la sécrétion de protons.
Le déficit en
potassium stimule la sécrétion de protons dans le
néphron distal et augmente la production de l’ammoniaque,
le principal tampon urinaire.
2- Altération de l’excrétion rénale de bicarbonate
:
Le mécanisme principal de défense contre l’alcalose
métabolique est l’excrétion rénale de bicarbonate via la
diminution de la réabsorption proximale tubulaire de
bicarbonate.
Dans l’alcalose métabolique, les facteurs
qui peuvent altérer la capacité à éliminer du bicarbonate
sont la diminution de la filtration glomérulaire et la stimulation
de la réabsorption proximale de bicarbonate,
par exemple par augmentation de la PCO2 ou une stimulation
hormonale par l’angiotensine II et enfin le déficit
en potassium.
B - Principaux syndromes cliniques associés
:
L’alcalose métabolique est observée dans les situations
cliniques qui favorisent à la fois la génération et la maintenance
de l’alcalose métabolique.
Ces situations cliniques
peuvent être divisées en quatre grandes catégories.
En cas d’insuffisance rénale significative, la clairance
du bicarbonate est diminuée et une alcalose métabolique
sévère peut survenir après l’administration de bicarbonate
exogène.
Dans ce cas, il existe souvent la
conjonction de plusieurs facteurs comme par exemple
l’administration d’acétate ou de carbonate de calcium,
voire une supplémentation en bicarbonate de sodium et
une contraction volémique par les diurétiques.
L’insuffisance rénale joue également un rôle important
dans la survenue de l’alcalose métabolique par association
d’antacides et de résines échangeuses d’ion.
2- Excès d’apports alcalins
:
Une alcalose métabolique peut survenir lorsque de très
grandes quantités de bicarbonate ou de n’importe quel anion organique sont administrées très rapidement ou
lorsqu’il existe une diminution de la capacité d’excrétion
du bicarbonate.
Une alcalose métabolique peut être ainsi induite par
l’administration de larges quantités de bicarbonate de
sodium, de citrate (transfusions de plus de 8 unités sanguines anticoagulées avec du citrate), ou encore l’administration
de plasma frais congelé citraté, comme liquide
de substitution pendant des échanges plasmatiques.
3- Alcalose métabolique par contraction volémique
:
Ces situations sont caractérisées par une contraction du
volume artériel efficace, une circonstance habituellement
associée à une diminution de l’apport distal de
sodium et une stimulation du système rénine-angiotensine
par l’hypovolémie.
Si, en même temps, l’apport distal
de sodium est augmenté de façon inappropriée, comme
par exemple avec un traitement diurétique, au cours du
syndrome de Bartter et au cours des déficits en magnésium
ou en raison de la présence dans le tube collecteur
d’un anion faiblement réabsorbable, alors l’excrétion
nette d’acide est stimulée et l’alcalose peut survenir.
L’alcalose métabolique post-hypercapnique est une
situation au cours de laquelle l’hypercapnie chronique
entraîne une alcalose métabolique compensatoire.
Pendant cette période d’hypercapnie, la rétention rénale
de bicarbonate s’associe à une chlorurèse qui est
secondaire à la rétention de bicarbonate et à l’expansion
volémique.
Plusieurs situations entraînent une alcalose métabolique
avec contraction volémique d’origine extrarénale.
Il
s’agit essentiellement des pertes digestives, telles que
les vomissements, l’aspiration nasogastrique, l’adénome
villeux du rectum, l’achlorhydrie congénitale et une
contraction volémique sévère.
Dans toutes ces situations,
l’alcalose aboutit à une fuite rénale de potassium et
cette déplétion potassique contribue à maintenir de
l’alcalose métabolique.
4- Alcalose métabolique avec expansion volémique, hypertension artérielle et excès
de minéralocorticoïdes :
Ces situations cliniques sont caractérisées par une
augmentation de l’activité minéralocorticoïde dite
primitive, c’est-à-dire persistant malgré une expansion
du volume extracellulaire.
Sur une base clinique, 3 sous-groupes peuvent être
distingués selon le niveau de rénine et d’aldostérone
circulante.
• Patients avec un hyperaldostéronisme secondaire à
une rénine élevée : ces conditions comportent la sténose
de l’artère rénale, l’hypertension artérielle maligne et la
tumeur sécrétant de la rénine (réninome).
• L’hypersécrétion d’aldostérone peut être primitive
et associée à une suppression de la rénine plasmatique.
Il s’agit de toutes les formes d’hyperaldostéronisme primaire
lié à un adénome surrénal (syndrome de Conn,
une hyperplasie surrénale bilatérale, un cancer surrénal ou encore l’hyperaldostéronisme sensible à la dexaméthasone.
• Un troisième groupe de patients présente des signes
d’activité excessive des minéralocorticoïdes mais liée à
un agent autre que l’aldostérone.
Dans ce cas, la rénine
et l’aldostérone plasmatiques sont effondrées.
Il s’agit des syndromes adrénogénitaux (hypersécrétion
de désoxycorticostérone) et des syndromes de Cushing
(hypersécrétion de cortisol), de toutes les situations
s’accompagnant d’une diminution d’activité de la
11-b-hydroxystéroïde déshydrogénase (HSD) [syndrome
d’excès apparent en minéralocorticoïdes].
La diminution
de l’activité 11-b-HSD peut être soit génétique soit
acquise, notamment en présence d’un inhibiteur comme
l’acide glycérrhétinique présent dans la réglisse, l’antésite.
Le syndrome de Liddle (ou pseudo-hyperaldostéronisme)
est une maladie génétique rare à transmission autosomique
dominante liée à une mutation activatrice d’une
sous-unité du canal épithélial sodium dans le tube cortical
augmentant la réabsorption de sodium en échange de
la sécrétion de potassium et de proton.
C - Évaluation du patient ayant une alcalose
métabolique :
L’étape initiale consiste en la réalisation des gaz du sang
artériel pour vérifier l’existence d’une alcalose métabolique
primitive plutôt que de la compensation d’une
acidose respiratoire.
La 2e étape consiste à évaluer les facteurs responsables
de la maintenance de cette alcalose métabolique : insuffisance
rénale, contraction volémique, hyperminéralocorticisme
et augmentation du débit distal de sodium.
Cette étape nécessite donc l’évaluation du volume
circulant efficace sur la base de la pression artérielle, de
la fréquence cardiaque et de leurs modifications au
cours de l’orthostatisme.
L’élévation de l’uricémie et
du rapport urée/créatinine plasmatique est également
suggestive de contraction volémique.
L’interprétation des électrolytes urinaires est très contributive.
Les patients ayant une contraction volémique ont
généralement une concentration urinaire abaissée de
sodium et de chlore.
Cependant la bicarbonaturie ou
l’excrétion d’autres anions non réabsorbables peut
augmenter la natriurèse même en présence d’une
contraction volémique.
Dans ce cas, la concentration
urinaire de chlore est un indice plus spécifique.
Une concentration urinaire de chlore < 25 mmol/L, est
fortement suggestive de contraction volémique.
Lorsque
la concentration de sodium est dissociée et élevée, il
s’agit probablement d’une bicarbonaturie ou de l’excrétion
urinaire d’un excès d’anions non réabsorbables.
Un pH urinaire supérieur à 7 suggère une bicarbonaturie
significative (génération extrarénale de bicarbonate liée
à des vomissements, une aspiration nasogastrique, une
perte de chlore, une diarrhée dans un contexte clinique
généralement évident).
Un pH urinaire inférieur à 6,5
suggère au contraire la présence d’un anion non réabsorbable
comme de l’hydroxybutyrate ou un antibiotique.
Une concentration urinaire de chlore élevée chez un
patient ayant une contraction volémique suggère le rôle
des diurétiques, d’un syndrome de Bartter ou de
Gitelman, ou une déplétion en magnésium.
Si le patient a une hypertension artérielle et apparaît euvolémique ou en expansion volémique, une augmentation
primitive des minéralocorticoïdes est plus
vraisemblable.
La détermination de la rénine et de l’adostérone
plasmatique représente l’étape diagnostique
suivante.
D - Conséquences cliniques de l’alcalose
métabolique :
L’alcalose métabolique est généralement perçue à tort
comme une condition bénigne alors qu’elle contribue
significativement à la mortalité.
L’alcalose déprime la
respiration par un effet à la fois central et périphérique
sur les chémorécepteurs.
L’alcalose diminue l’oxygénation
tissulaire par l’effet Bohr (qui déplace la courbe de
dissociation en oxygène de l’hémoglobine en diminuant
la capacité à relarguer l’oxygène dans les tissus périphériques).
De plus, l’alcalose est un vasoconstricteur puissant,
diminuant la perfusion dans de nombreux organes tels
que le cerveau, le rein, le coeur et la circulation périphérique.
La vasoconstriction et l’hypoxémie induite
par l’alcalose peuvent aboutir à une hypoxémie tissulaire
critique et provoquer un angor même en l’absence de maladie
coronaire sténosante.
L’alcalose favorise la survenue
d’arythmies cardiaques réfractaires aux antiarythmiques
usuels et ne répondant qu’à la correction de l’alcalose.
E - Traitement de l’alcalose métabolique
:
Ce traitement fait appel essentiellement à la correction
du facteur responsable du maintien de l’alcalose.
Il est
de plus souvent utile de corriger le facteur qui a généré
cette alcalose.
En cas d’alcalose métabolique maintenue par la contraction volémique, l’administration de chlorure de sodium
est efficace.
Il est généralement souhaitable de corriger
une carence en magnésium, une carence sévère en
potassium (par du KCl), de supprimer, lorsque cela est
possible, la source de l’excès en minéralocorticoïdes,
d’arrêter un traitement diurétique ou une aspiration
nasogastrique.
Une alcalémie sévère définie par un pH sanguin
supérieur à 7,60 et une bicarbonatémie supérieure à
45 mmol/L en présence d’une réponse ventilatoire
adaptée nécessite une intervention immédiate ayant pour
but une correction au moins partielle de l’alcalémie, les
cibles étant une bicarbonatémie de 35-40 mmol/L correspondant
à un pH sanguin de 7,50-7,55.
Les alcalémies
métaboliques les plus sévères sont généralement
les formes associées à une contraction du volume extracellulaire
par un déficit en chlore (pertes d’acide gastrique
et traitements diurétiques).
Lorsque la vitesse de correction de l’alcalémie doit être
accélérée, l’excès d’alcalin peut être titré par l’administration
intraveineuse d’acide chlorhydrique.
La perfusion
par voie intraveineuse d’acide chlorhydrique (habituellement
dilué dans une solution salée isotonique par ex.
100 à 200 mmol d’hydrogène par litre) sur 8 à 24 h
représente une méthode sûre et très efficace de correction
de l’alcalémie métabolique.
La solution doit être injectée
par voie veineuse centrale car l’HCl est très corrosif.
La
quantité d’HCl nécessaire en mmol peut être estimée à
partir de l’espace de distribution du bicarbonate que
multiplie l’excès de bicarbonate (HCl en mmol = 0,5 x
poids du corps x (i concentration plasmatique de bicarbonate
observée – souhaitée).
Les précurseurs de l’HCl ne devraient plus être utilisés
en raison des risques importants : hyperkaliémie sévère
avec l’hydrochloride d’arginine ; hyperammoniémie et
encéphalopathie hépatique avec le chlorure d’ammonium
chez les patients avec une insuffisance hépatique.
Chez certains patients, avec une insuffisance cardiaque
ou rénale ne permettant pas l’administration de chlorure
de sodium ou d’HCl le traitement est particulièrement
délicat.
Chez les patients en bilan sodé positif et dont
l’alcalose de contraction se majore sous traitement
diurétique par diurétique de l’anse, on peut recourir à un
inhibiteur de l’anhydrase carbonique (acétazolamide,
Diamox).
Le risque est l’aggravation de l’hypercapnie,
en particulier chez des patients ayant une acidose respiratoire
chronique.
En cas de surcharge hydrosodée associée
à une alcalose de contraction réfractaire il est souvent
nécessaire de recourir à des techniques d’épuration
extrarénale pour corriger à la fois l’alcalémie et la
surcharge hydrosodée.
Chez les patients avec une alcalose métabolique et une
expansion volémique liée à un excès primitif de minéralocorticoïdes,
il est nécessaire d’intervenir sur la cause de
cette hyperactivité minéralocorticoïde.
Quand cela n’est
pas possible, le traitement symptomatique fait appel à la spironolactone (Aldactone) qui bloque compétitivement
le récepteur aux minéralocorticoïdes, ou à un diurétique
dit épargneur du potassium (amiloride, Modamide) qui
bloque le canal sodium épithélial dans le tube collecteur
cortical.
Acidose et alcalose respiratoires
:
En condition normale, la PCO2 sanguine est maintenue
à une valeur de 39 à 41 mmHg par la ventilation alvéolaire
sous le contrôle des centres respiratoires dans la
zone oblongue pontique et médullaire.
Des modifications
de la production de CO2 s’accompagnent d’altérations
correspondantes de la ventilation alvéolaire
aboutissant à peu ou pas de changement de la PCO2.
La
ventilation est régulée par les chémorécepteurs cérébraux
pour la PCO2, la PO2 et le pH et par des impulsions
neurales provenant des chémorécepteurs artériels et des
mécanorécepteurs pulmonaires et enfin par des impulsions
provenant du cortex cérébral.
L’acidose ou l’alcalose
respiratoire proviennent d’une altération primitive, augmentation ou diminution respectivement, de la PCO2
sanguine.
Ces anomalies peuvent coexister avec
d’autres désordres acide-base primitifs.
A - Hypercapnie aiguë
:
L’hypercapnie aiguë a de nombreuses causes comprenant
notamment l’obstruction des voies aériennes, une
dépression des centres respiratoires (d’origine médicamenteuse
ou par lésions du tronc cérébral), une faiblesse neuro-musculaire (médicamenteuse, myasthénie, syndrome
de Guillain et Barré), une maladie pulmonaire
restrictive (pneumothorax, pneumopathie sévère), une
ventilation mécanique inadéquate et une altération
circulatoire sévère.
Dans les minutes suivant une augmentation aiguë de la
PCO2, il existe une augmentation modeste de la concentration
plasmatique de bicarbonates liée largement au
tamponnement intracellulaire des protons carbonateacides
et de la perte cellulaire de bicarbonates en échange
de chlore.
L’augmentation de la bicarbonatémie ne
s’accompagne pas d’une bicarbonaturie indiquant une
augmentation adaptée de la réabsorption de bicarbonates.
L’hyperphosphatémie est une conséquence de
l’hypercapnie aiguë. Les patients manifestent une anxiété,
une polypnée et peuvent évoluer vers l’encéphalopathie
avec myoclonie, convulsions en cas d’hypercapnie sévère.
Le traitement doit être dirigé vers l’amélioration de la
ventilation par ventilation mécanique si nécessaire et la
correction de la cause sous-jacente.
B - Hypercapnie chronique ou acidose
respiratoire chronique :
L’hypercapnie chronique peut être causée par de nombreuses
maladies telles que les maladies pulmonaires
chroniques obstructives, des anomalies des centres
respiratoires (syndrome d’apnée du sommeil, obésité,
hypoventilation), des désordres neuromusculaires
(sclérose latérale amyotrophique), et des maladies restrictives
pulmonaires (fibrose interstitielle, déformation
thoracique).
La PCO2 du liquide céphalo-rachidien se modifie rapidement
pour égaler la PCO2 artérielle sanguine.
L’hypercapnie qui persiste pendant plusieurs heures
induit une augmentation de la concentration en bicarbonates
du liquide céphalo-rachidien qui atteint un maximum
vers 24 h et restaure partiellement le pH du liquide
céphalo-rachidien.
Une hypercapnie prolongée stimule
également la sécrétion nette rénale d’acide, augmentant
la concentration sanguine de bicarbonates jusqu’à un
nouvel état d’équilibre atteint après 3 à 5 jours.
La prudence est de mise pour réduire la PCO2 chez ces
patients.
Une correction brutale de l’hypercapnie (par
ventilation mécanique par exemple) alcalinise le liquide
céphalo-rachidien, ce qui peut causer des convulsions et
induire une alcalose métabolique systémique aiguë
pouvant persister plusieurs jours.
C - Hypocapnie aiguë
:
Les principales causes d’hypocapnie aiguë sont
l’hypoxie, l’anxiété, la douleur, le sepsis, l’insuffisance
hépatique, les désordres neurologiques centraux (accident
vasculaire cérébral, infection), les maladies pulmonaires
(infections et maladies interstitielles pulmonaires), les
médicaments (intoxication aux salicylés) et la grossesse.
Une réduction aiguë de la PCO2 produit une diminution
de faible intensité mais immédiate de la bicarbonatémie
liée à la captation cellulaire de bicarbonates en échange
de chlore.
L’hypocapnie aiguë augmente aussi la captation
cellulaire de potassium et de phosphate dont les concentrations
plasmatiques s’abaissent et augmente la liaison
du calcium ionisé à l’albumine sérique.
Les patients
avec une hypocapnie aiguë peuvent développer des
arythmies cardiaques, une vasoconstriction cérébrale,
des paresthésies faciales et périphériques, des crampes
musculaires, une syncope ou des convulsions.
Le traitement
doit être orienté vers la diminution de l’hyperventilation
par la sédation si nécessaire et la correction
de la cause sous-jacente.
D - Hypocapnie chronique
:
Plusieurs situations telles que l’hypoxie de haute altitude,
l’insuffisance hépatique chronique, les maladies pulmonaires
chroniques, les traumatismes du système nerveux
central, et la grossesse peuvent produire une alcalose
respiratoire chronique.
L’hypocapnie prolongée induit une réduction correspondante
de la PCO2 du liquide céphalo-rachidien et une
chute de la concentration en bicarbonates de ce dernier
corrigeant le pH en l’abaissant.
En l’espace de quelques
minutes à quelques heures d’hypocapnie prolongée, il y
a une inhibition de la réabsorption tubulaire proximale
de bicarbonates et une bicarbonaturie.
Un nouvel état
d’équilibre est atteint en 2 à 3 jours avec une diminution
de la concentration plasmatique de bicarbonates.
Cette
concentration plasmatique de bicarbonates peut nécessiter
plusieurs jours pour revenir à la normale après correction
de l’hypocapnie chronique résultant transitoirement en
une acidose métabolique hyperchlorémique.