Dilatations des bronches
Cours de médecine interne
Les dilatations des bronches restent fréquentes, les mécanismes en cause mieux compris.
Leur approche
diagnostique a largement bénéficié des progrès de l’imagerie venant compléter une histoire et une
présentation clinique souvent très évocatrice.
Elles restent idiopathiques dans près de 50% des cas même si les
affections associées ou responsables sont aujourd’hui mieux appréhendées.
Le traitement est actuellement bien
codifié et repose pour l’essentiel sur la prise en charge des éléments du cercle vicieux décrit par Cole.
Définition :
Les bronchectasies sont définies par une augmentation permanente et
irréversible du calibre des bronches.
Leurs fonctions sont altérées dans des
territoires plus ou moins étendus.
Les mécanismes physiopathologiques
intervenant dans la genèse de la maladie et sa pérennisation font intervenir des
facteurs infectieux, mécaniques, environnementaux, toxiques ainsi que des
facteurs liés à l’hôte.
Cette maladie est fréquente, s’observe chez des patients de plus de 50 ans
dans 75%des cas et prédomine chez la femme.
Elle est, à tort, confondue avec la
bronchite chronique.
Physiopathologie
:
Les bronchectasies sont la conséquence de phénomènes essentiellement
locaux : agression de la muqueuse bronchique, favorisant les infections et la
colonisation bactérienne, réponse inflammatoire de l’hôte.
Les dommages
tissulaires en sont la conséquence, responsables d’une accumulation de
sécrétions purulentes.
Ces phénomènes constituent les principaux éléments du
cercle vicieux de Cole, avec la pérennisation de l’inflammation locale et le
développement des dilatations des bronches.
La charge bactérienne permet le relargage in situ de facteurs chimiotactiques pour les polynucléaires.
Ceux-ci
libèrent des protéases (dont l’élastase neutrophile) qui ont un rôle délétère sur la
muqueuse bronchique et contribuent à l’entretien de l’inflammation et de
l’hypersécrétion bronchique.
L’altération de la clairance mucociliaire, constitutionnelle ou secondaire,
retrouvée au cours des bronchectasies, est aggravée au moment des poussées
infectieuses par les toxines bactériennes et par les protéases relarguées par les
polynucléaires neutrophiles.
Différents facteurs contribuent à la pérennisation de
ces phénomènes : l’hypersécrétion de mucus, les lésions épithéliales avec
altération des battements ciliaires, l’abrasion de l’épithélium cilié…
Ces
perturbations mucociliaires expliquent l’encombrement et l’obstruction au niveau
des voies aériennes périphériques.
Classification anatomopathologique
:
A - Aspects macroscopiques :
Les bronches atteintes sont comprises entre le quatrième ordre et le huitième
ordre de division et appartiennent préférentiellement aux lobes inférieurs.
Quand
elles sont bilatérales, elles prédominent souvent à gauche.
Elles sont
macroscopiquement tortueuses et ramollies.
Le poumon de voisinage peut être
fibreux. En aval, les bronchioles sont obstruées.
Trois présentations sont visibles, de gravité croissante :
– les bronchectasies cylindriques (ou fusiformes) se repèrent par la dilatation
régulière des lumières bronchiques, en amont d’un bouchon muqueux
brutalement obstructif.
En distalité, le nombre de bronchioles est à peine réduit ;
– les bronchectasies variqueuses (ou moniliformes) se caractérisent par la
succession de dilatations irrégulières des lumières bronchiques et de sténoses
incomplètes.
L’obstruction est plus distale.
Le nombre de bronchioles est
significativement réduit ;
– les dilatations sacciformes ou kystiques qui touchent la partie proximale de
l’arbre bronchique.
Les bronches augmentent progressivement de diamètre et se
terminent en cul-de-sac au niveau des bronches de quatrième et cinquième
génération. Au-delà, il y a obstruction, destruction ou absence de ramification
bronchique et bronchiolaire.
B - Aspects microscopiques
:
L’atteinte inflammatoire touche la paroi bronchique.
La destruction de tous ses
constituants (tissu élastique, cartilage, muscle lisse) est maximale dans les
bronchectasies variqueuses.
La cicatrisation laisse en place du tissu fibreux.
La
muqueuse peut être ulcérée (par contiguïté).
Une hypervascularisation
systémique est constamment observée à l’origine d’hémoptysies fréquentes.
C’est
le jeu des anastomoses artérielles bronchiques et pulmonaires qui rend
l’hémoptysie potentiellement grave.
Étiologies et facteurs prédisposants :
La dilatation des bronches n’est jamais congénitale.
Les formes diffuses
s’expriment sur des terrains prédisposants : mucoviscidose, déficit immunitaire
humoral ou cellulaire, dyskinésies ciliaires primitives.
Des infections bronchopulmonaires sévères de l’enfance, une coqueluche ou une infection
virale (virus respiratoire syncytial [VRS]) sont incriminées bien qu’il soit toujours
difficile d’en faire la preuve rétrospectivement.
Les formes localisées sont plutôt
liées à une compression ou à une obstruction bronchique.
A - Facteurs infectieux
:
Des antécédents d’infection respiratoire sévère (coqueluche, infection virale…)
sont retrouvés dans plus de 50% des cas.
La diminution de la prévalence de la
dilatation des bronches avec l’antibiothérapie et les vaccinations constitue un
argument supplémentaire pour leur responsabilité présumée.
Divers mécanismes sont imputés dans la tuberculose : compression
bronchique par une adénopathie, destruction parenchymateuse ou traction par
les tissus cicatriciels.
La rougeole, les infections à Mycoplasma pneumoniae, à VRS ou à adénovirus
et plus récemment l’infection au virus de l’immunodéficience humaine (VIH) sont
incriminées.
Au cours de l’aspergillose bronchopulmonaire allergique (ABPA), les
bronchectasies sont classiquement proximales liées à la coexistence
d’obstructions bronchiques (bouchons muqueux constitués de feutrage mycélien
et de polynucléaires) et de réactions allergiques contre les antigènes
aspergillaires.
Le diagnostic d’ABPA est évoqué devant la triade asthme,
bronchectasies proximales et hyperéosinophilie.
B - Facteurs mécaniques
:
L’inhalation d’un corps étranger, une compression bronchique d’origine
ganglionnaire, une tumeur bronchique ou un traumatisme peuvent favoriser le
développement de bronchectasies localisées.
Le traitement chirurgical doit être
discuté dans certaines circonstances.
C - Facteurs associés :
Le reflux gastro-oesophagien et l’inhalation de produits toxiques variés sont
incriminés.
Les observations consécutives à l’injection intraveineuse d’héroïne
sont plus exceptionnelles et ont la particularité de se constituer en quelques
semaines.
D - Facteurs liés à l’hôte
:
1- Pathologies malformatives et génétiques
:
Elles sont rares.
– Le syndrome de Williams-Campbell s’exprime par une déficience
cartilagineuse.
Ce syndrome, décrit pour la première fois en 1960, est une cause
rare de dilatations des bronches, liée à une absence, une réduction ou une
altération du cartilage des bronches.
Des formes familiales ont été décrites.
– Le syndrome de Mounier-Kühn associe une dilatation de la trachée et des
bronches principales, et une polypose nasosinusienne.
Il apparaît relativement
tardivement. Des ectasies trachéobronchiques s’observent en endoscopie et en
tomodensitométrie haute résolution (TDM-HR).
– L’existence d’un déficit immunitaire, congénital ou acquis, favorise le
développement de bronchectasies.
Si les déficits de l’immunité cellulaire peuvent
être en cause, les déficits de l’immunité humorale sont les plus fréquents. Il peut
s’agir d’une hypo- ou pan-hypo-gammaglobulinémie, d’un déficit touchant une
classe d’immunoglobulines (IgA, IgG, IgM), ou une sous-classe
d’immunoglobulines.
Ils peuvent justifier un traitement substitutif.
Dans le
syndrome de Good qui associe thymome et déficit de l’immunité humorale, des
dilatations des bronches sont notées au décours d’infections pulmonaires à
répétition.
– Des anomalies de la fonction ciliaire peuvent favoriser l’apparition de
dilatation des bronches : les dyskinésies ciliaires primitives constituent un groupe
hétérogène de maladies associant des infections récurrentes des voies aériennes
supérieures ou inférieures avec des bronchectasies, une stérilité masculine et des
anomalies de la structure ciliaire en microscopie électronique.
Un situs inversus
peut être associé (syndrome de Kartagener).
On en rapproche le syndrome de
Young qui associe une azoospermie obstructive, des infections bronchiques avec
bronchectasies et une diminution de la clairance mucociliaire.
Plus que des
anomalies ciliaires, des anomalies de sécrétion de mucus expliqueraient les
signes cliniques au cours de ce syndrome qui pourrait être lié à une intoxication
mercurielle.
– Au cours du syndrome de Marfan, la présence de bronchectasies est décrite.
– La mucoviscidose constitue une étiologie avérée des dilatations des
bronches.
Elle se rencontre de plus en plus souvent chez des adultes compte tenu
de l’amélioration de l’espérance de vie des patients atteints.
Elle est de révélation
plus tardive dans les formes d’expression incomplète, justifiant la recherche d’une
mutation du gène CFTR devant un test à la sueur positif ou douteux chez l’adulte.
– Le déficit en alpha-1-antitrypsine est surtout responsable d’un emphysème pan-acinaire mais figure aussi parmi les étiologies possibles de bronchectasies.
Le
lien de causalité n’est alors pas formellement établi.
2-
Maladies systémiques :
L’existence de bronchectasies dans ce cadre est de connaissance récente grâce
à la réalisation aisée de la TDM-HR.
– La polyarthrite rhumatoïde (PR) est l’exemple le plus démonstratif. Une
nette prédominance féminine est observée.
La suppuration bronchique précède
souvent l’apparition des manifestations cliniques de la PR.
Plusieurs facteurs sont
évoqués : infectieux, suggérant des analogies antigéniques entre les tissus
synoviaux et certaines membranes bactériennes, immunologiques ou
génétiques. Les séries autopsiques estiment la fréquence des bronchectasies au
cours de la PR entre 5,2 et 11,9 %, mais une étude en TDM-HR portant sur
84 patients retrouve des anomalies bronchiques dans 30%des cas.
– Au cours du lupus érythémateux disséminé, les mêmes anomalies sont
observées (20% des cas).
Il s’agit d’anomalies radiologiques en général sans
syndrome suppuratif bronchique associé.
– D’autres affections, plus rares, comportent quasi constamment des
bronchectasies : granulomatose bronchocentrique, syndrome de Buckley, ou
syndrome hyper-IgE, qui associe des infections répétées, une dermatite chronique
eczématiforme, un syndrome dysmorphique inconstant.
Des bronchectasies
peuvent aussi s’observer dans le syndrome de Sjögren et des colites
inflammatoires.
Dans la rectocolite hémorragique, les bronchectasies
apparaissent dans les formes sévères, parfois au cours de poussées de rectocolite.
Les stéroïdes influent sur le volume de l’expectoration.
Les bronchectasies sont décrites dans les vascularites systémiques ou
cutanées, la thyroïdite d’Hashimoto, l’anémie pernicieuse ou la cirrhose biliaire
primitive.
Les bronchectasies par traction observées lors des fibroses pulmonaires sont
directement liées aux modifications des propriétés mécaniques du parenchyme
pulmonaire.
De ce fait, leur topographie et leur substrat histologique sont
différents.
Agents pathogènes :
Les enquêtes microbiologiques reposent sur l’examen bactériologique des
expectorations.
Les germes les plus fréquents sont par ordre décroissant Haemophilus
influenzae (HI), Pseudomonas aeruginosa (PA), Staphylococcus aureus (SA) et
Streptococcus pneumoniae (SP).
Ces bactéries cohabitent avec l’hôte au point de
réaliser une véritable colonisation, en particulier pour HI et PA.
Elles s’adaptent
aux conditions locales en acquérant de nouvelles propriétés, comme PA qui peut
se recouvrir d’une substance polysaccharidique (acide alginique) le protégeant
des moyens de défense mis en jeu par l’hôte : ce sont les souches mucoïdes.
D’autres agents infectieux sont pathogènes : Mycobacterium tuberculosis et les
mycobactéries atypiques.
L’infection à Mycobacterium avium intracellulare doit
être suspectée devant l’association de bronchectasies et de nodules multiples au
sein du même lobe.
Il est difficile d’évaluer la fréquence des germes anaérobies.
Clinique :
– L’expectoration est habituellement ancienne et quotidienne.
Cette
bronchorrhée est variable quantitativement et qualitativement.
Elle peut
manquer.
Son importance va de la simple toux chronique ramenant une
expectoration semblable à celle de la bronchite chronique jusqu’à la
bronchorrhée abondante de plusieurs centaines de millilitres par jour.
Lorsqu’elles sont abondantes, les expectorations sédimentent en plusieurs
couches : spumeuse supérieure, muqueuse intermédiaire et purulente inférieure
avec des débris.
L’interrogatoire permet parfois de rapporter le début de cette
bronchorrhée à l’enfance ou l’adolescence.
Mais l’anamnèse peut rester pauvre,
surtout si le développement de la maladie est insidieux.
– Les hémoptysies sont fréquentes et signalées par 50 à 70% des patients.
Elles vont du simple crachat strié de sang dû à l’érosion de la muqueuse
bronchique inflammatoire, surtout à l’occasion de poussées de surinfection, aux
hémoptysies massives liées à une rupture d’artère bronchique.
Elles peuvent
constituer le premier symptôme de la maladie dans les formes dites « sèches ».
– La dyspnée est variable.
Elle dépend de l’étendue des lésions et du degré
d’encombrement.
Elle peut se manifester uniquement à l’effort dans les formes
localisées, ou traduire une insuffisance respiratoire chronique grave dans les
formes étendues.
– Les signes généraux sont étonnamment absents, même chez des patients
présentant une suppuration importante.
L’altération de l’état général s’observe
quand la dilatation des bronches parvient au stade d’insuffisance respiratoire
chronique grave ou se complique d’une infection sévère locale ou générale.
– Les signes cliniques ne sont pas spécifiques.
Les râles bronchiques
persistants sont le plus souvent retrouvés, classiquement inspiratoires, mais
parfois aussi présents en expiration (alors associés à des sibilants).
Les
« craquements » sont caractéristiques.
Leur topographie et leur importance traduit
l’étendue des lésions bronchiques.
Des foyers de râles crépitants peuvent être la
traduction d’une extension alvéolaire de l’infection.
L’hippocratisme digital est
observé plus volontiers dans les formes étendues et anciennes.
Les signes
d’insuffisance cardiaque droite sont le témoignage d’une insuffisance respiratoire
évoluée.
Des infections parenchymateuses récidivantes dans un même territoire
peuvent s’expliquer par une dilatation des bronches localisée.
Une sinusite
chronique peut s’y associer.
L’examen recherche des arguments extrapulmonaires pour une maladie
générale.
Examens paracliniques :
Si le diagnostic de dilatation des bronches est évoqué sur les données
anamnestiques et cliniques, l’imagerie confirme le diagnostic en précisant la
morphologie, l’étendue, la gravité et le retentissement des bronchectasies.
A - Explorations radiologiques :
1- Radiographie thoracique :
La radiographie thoracique est habituellement anormale.
Elle ne détecte pas
les petites bronchectasies et les bronchiolectasies.
Sont recherchées des
anomalies directes et indirectes.
* Signes directs :
– Les bronchectasies cylindriques s’expriment par des opacités tubulées
matérialisant la paroi bronchique épaissie comprise entre la clarté de la lumière
bronchique élargie et le poumon aéré de voisinage.
Leur présentation varie selon
l’orientation des bronches.
– Les opacités tubulées correspondent à des bronches pleines dont le contenu
ne s’évacue pas.
L’impaction mucoïde et la bronchocèle en sont la traduction.
L’impaction mucoïde est un bouchon muqueux bronchectasiant qui siège avec
prédilection au sein des bronches segmentaires des lobes supérieurs, plus
rarement des lobes moyen et inférieurs.
Typiquement, elle réalise une opacité
tubulée à bords nets, proximale, parahilaire, orientée selon l’axe des bronches,
linéaire, en V ou en Y dont la pointe est tournée vers le hile.
La bronchocèle
correspond à une bronchectasie mal drainée dans la lumière de laquelle
s’accumulent des sécrétions en rétention.
Les aspects radiologiques sont
identiques dans un cas comme dans l’autre.
Seule la répartition change, lobaire
moins proximale.
– Les bronchectasies moniliformes ou variqueuses juxtaposées les unes
contre les autres et vues en coupe peuvent réaliser un aspect en « pseudorayon
de miel ».
– Les bronchectasies sacciformes ou kystiques réalisent un aspect multicavitaire, de topographie lobaire, plutôt de siège inférieur.
Des niveaux
liquidiens témoignent d’un drainage imparfait.
* Signes indirects :
– En aval des obstructions bronchiques, le collapsus est d’importance variable
touchant un ou plusieurs lobes.
Le lobe moyen est préférentiellement atteint du
fait de la proximité de très nombreux éléments ganglionnaires qui peuvent
provoquer une compression extrinsèque de la bronche lobaire moyenne.
2- Bronchographie :
La bronchographie n’est plus réalisée car elle est supplantée par la TDM-HR.
3- Tomodensitométrie thoracique :
La TDM-HR a transformé l’approche diagnostique des bronchectasies.
Le diagnostic peut être retenu devant :
– l’absence de réduction progressive de calibre des bronches au fur et à
mesure que l’on s’éloigne des hiles.
Ce signe est probablement le plus fiable ;
– le diamètre intrabronchique supérieur à celui de l’artère associée ;
– les bronches visualisées au niveau du tiers externe du parenchyme
pulmonaire.
Les bronchectasies cylindriques sont caractérisées par des bronches dilatées à
bords épais s’étendant vers la périphérie.
Elles ont un aspect en rails
quand elles sont parallèles ou presque à la coupe scanner.
La coupe transverse
donne un aspect en « bague à chaton », avec une bronche élargie, à bords épais
contenant de l’air, accompagnée d’une opacité ronde plus petite, l’artère
pulmonaire accolée.
Les bronchectasies variqueuses ont le même aspect,
mais avec des contours irréguliers.
Les bronchectasies kystiques se
présentent sous forme de véritables grappes de kystes lorsque plusieurs bronches
sont vues en coupe transversale ou bien comme un chapelet d’images kystiques
lorsqu’une seule bronche est visualisée longitudinalement.
L’examen TDM-HR permet, en un temps, de porter le diagnostic de
bronchectasies, de préciser leur type anatomique, leur extension, voire
d’éventuelles complications.
En outre, il peut parfois retrouver les signes d’une
affection causale.
B - Endoscopie trachéobronchique :
Elle précise la provenance de la bronchorrhée et recherche une cause locale.
Elle localise le segment bronchique vecteur d’une hémoptysie.
Elle précède alors
le geste radiologique vasculaire interventionnel ou la chirurgie quand elle est
grave.
Elle permet aussi la réalisation de prélèvements protégés, à visée
bactériologique.
C - Examen cytobactériologique des expectorations
:
Cet examen permet de suivre la colonisation bactérienne et est utile en cas de
surinfection bronchique, surtout après l’échec d’une antibiothérapie.
La
colonisation à PA marquerait un tournant évolutif de la maladie.
Elle est
associée d’une part à une qualité de vie moins bonne que celle des patients
colonisés à d’autres germes et d’autre part à une maladie plus étendue.
D - Exploration fonctionnelle respiratoire (EFR)
:
Elle doit être réalisée en état stable, en dehors des poussées infectieuses.
Les
patients porteurs de bronchectasies ne présentent pas de profil fonctionnel
particulier.
Les anomalies observées reflètent l’extension des lésions, leur gravité
et les éventuelles maladies respiratoires associées.
Un syndrome obstructif est
observé chez la plupart des patients étudiés.
La réversibilité partielle de cette
obstruction bronchique est rapportée, de même que l’existence d’une
hyperréactivité dans 25% des cas.
L’association à un syndrome restrictif est
fréquente, due en général à la présence de territoires atélectasiés ou non ventilés
du fait de sécrétions obstructives.
Ces anomalies expliquent, au moins en partie,
les altérations gazométriques observées à un stade évolué de la maladie.
Les
phases d’exacerbations ne modifient pas de façon significative les paramètres
fonctionnels respiratoires contrairement à la mucoviscidose.
La distance
parcourue et les variations de saturation du sang artériel en oxygène (SaO2) au
cours d’un test de marche sur 6 minutes apprécient probablement mieux le
retentissement de cette affection.
E - Scintigraphie pulmonaire de ventilation et/ou de perfusion
:
Il s’agit d’un examen diagnostique élégant, surtout chez l’enfant, car l’absence
d’amputation du lit vasculaire isotopique exclut l’existence de bronchectasies.
Cependant, il ne dispense pas de la réalisation d’un examen TDM-HR.
Chez l’adulte, il fournit des informations indispensables pour évaluer
l’opportunité d’un geste d’exérèse chirurgicale en quantifiant la ventilation et la
perfusion de chaque lobe.
F - Autres examens complémentaires
:
La recherche d’un foyer infectieux (dentaire ou otorhinolaryngologique
[ORL]) et d’un retentissement cardiaque est nécessaire.
Complications :
L’évolution et le pronostic sont essentiellement
fonction de l’étendue des lésions et du terrain.
Les formes localisées sont le plus souvent
marquées par une évolution simple.
Les surinfections sont rares et bien tolérées.
Le drainage bronchique bien compris permet de
limiter le retentissement de cette affection sur la vie quotidienne.
Les formes graves sont le reflet de complications
ou de formes étendues et évoluées.
– Les complications infectieuses sont les plus
fréquentes : colonisation bactérienne, épisodes de surinfection
bronchique, infection pulmonaire (abcédée ou non) ou pleurale.
Les localisations septiques à distance (abcès du
cerveau) sont devenues exceptionnelles.
La colonisation bronchique par PA survient
tardivement.
– Les complications hémorragiques, parfois révélatrices, peuvent survenir
sans raison apparente mais sont volontiers contemporaines d’une surinfection et
alors volontiers récidivantes.
Lors d’hémoptysies graves, une embolisation
artérielle et/ou un geste chirurgical peuvent être nécessaires.
– L’insuffisance respiratoire est le témoignage de bronchectasies étendues,
évoluant depuis de nombreuses années.
Elle ne présente pas de particularité par
rapport aux autres insuffisances respiratoires chroniques type bronchopneumopathie chronique obstructive.
– L’amylose, favorisée par la suppuration chronique, est devenue
exceptionnelle.
Traitement :
Le traitement repose d’emblée sur la suppression de tout irritant bronchique,
en particulier du tabac, la prise en charge des foyers infectieux (dentaires et ORL),
la prévention des infections respiratoires (vaccination antigrippale et antipneumococcique), et l’exclusion des antitussifs, somnifères et sédatifs dans les
formes évoluées.
Il s’appuie ensuite sur les grands axes du cercle vicieux de Cole :
– permettre un meilleur drainage des sécrétions ;
– contrôler la colonisation et l’infection bactérienne ;
– réduire l’inflammation bronchique ;
– gérer les complications non infectieuses et l’insuffisance respiratoire.
A - Permettre un meilleure drainage des sécrétions
:
Le drainage bronchique est prioritaire.
Le drainage de posture et
l’expectoration dirigée permettent d’assurer un drainage bronchique efficace en
évitant les quintes de toux asthéniantes, en limitant les complications infectieuses
et en retardant l’évolution vers l’insuffisance respiratoire.
Le drainage bronchique
ne se conçoit que régulier, quotidien, voire pluriquotidien, au mieux assisté par un
kinésithérapeute compétent.
Les fluidifiants bronchiques sont indiqués devant des sécrétions purulentes si
une bonne hydratation est insuffisante.
En ce qui concerne la
désoxyribonucléase, l’étude de O’Donnell publiée en double aveugle contre
placebo, multicentrique, a impliqué 349 patients porteurs de dilatations des
bronches idiopathiques, stables, traités pendant 24 semaines.
Sous ce traitement
les critères de jugement principaux (épisodes d’exacerbation, dégradation du
volume expiratoire maximal-seconde : VEMS) et secondaires (hospitalisation,
cures d’antibiotiques, déclin de la capacité vitale) se sont aggravés.
Ceci contraste
avec les résultats obtenus dans la mucoviscidose.
Les bronchodilatateurs se justifient devant la forte prévalence de
l’hyperréactivité bronchique et de l’asthme rapportée.
Le recours aux
bêta-2-mimétiques, d’action rapide ou prolongée, per os ou par inhalation, et/ou
aux anticholinergiques doit être testé.
B - Contrôler l’infection bactérienne
:
L’antibiothérapie préventive au long cours a été proposée par certains.
Elle
s’appuie sur des études anciennes. Une antibiothérapie prolongée, outre son
coût, fait courir le risque d’une sélection de germes, du développement de
résistances et d’effets secondaires.
Elle n’est pas indiquée actuellement.
L’antibiothérapie ne doit être instaurée qu’en cas de fièvre, de complications
infectieuses, pulmonaires ou pleurales, ou devant les aggravations avérées de la
dyspnée, du volume et de la purulence des expectorations (témoignage d’une
surinfection bactérienne récente).
L’examen cytobactériologique de
l’expectoration, réalisé dans des conditions rigoureuses et incluant
impérativement une culture quantitative, permet de guider le choix de
l’antibiothérapie.
Il est indiqué devant une surinfection persistante, récidivante ou
sévère.
Il met classiquement en évidence des bactéries du genre HI, PA et SA.
La durée minimale de traitement est de 10 à 14 jours.
La voie d’administration
peut être orale, en augmentant la posologie en cas d’utilisation d’une bêtalactamine (dont la diffusion bronchique est limitée).
Les fluoroquinolones
peuvent avoir une place importante du fait de leurs propriétés
pharmacocinétiques et de leur spectre.
Une infection à PA conduit à une bithérapie (association de bêtalactamines et
d’aminosides ou quinolones) visant à limiter l’émergence de souches résistantes.
Les posologies usuelles sont alors recommandées lors des phases
d’exacerbation.
Des cures séquentielles d’antibiotiques ont été proposées par
certains auteurs en cas de colonisation à PA à l’image de ce qui est proposé dans
la mucoviscidose. Certaines équipes recommandent l’administration d’aérosols
d’antibiotiques.
L’étude Tobi a montré son efficacité en termes
bactériologiques (concentration des germes) mais sans modifier la fonction
respiratoire.
Une autre étude (avec l’association ceftazidime-tobramycine),
réalisée sur 1 an, a montré un impact positif uniquement sur le nombre
d’admissions à l’hôpital et le nombre de jours hospitalisés, sans variation des
paramètres fonctionnels respiratoires.
Il reste à valider les indicateurs d’efficacité
de ces stratégies thérapeutiques dans la prise en charge des bronchectasies.
C - Réduire l’inflammation bronchique
:
Les corticostéroïdes ont un intérêt théorique.
Ils permettent de réduire les
sécrétions des glandes bronchiques et le recrutement de cellules inflammatoires,
de contrôler l’hyperplasie des cellules sécrétoires et de limiter l’inflammation.
Ils
agissent également sur l’hyperréactivité bronchique.
Elborn, en 1992, montre
que les corticoïdes inhalés réduisent le poids de l’expectoration par 24 heures,
améliorent le débit expiratoire de pointe et le VEMS, et réduisent le score de toux.
Tsang, en 1998, montre que les corticoïdes inhalés réduisent la concentration
des leucocytes et de l’interleukine (IL) 1b, IL8, leucotriène B4 dans les
expectorations, alors que les paramètres spirométriques restent inchangés.
L’effet anti-inflammatoire des macrolides à faible dose a fait la preuve de son
efficacité dans les pan-bronchiolites.
Tsang, en 1999, démontre sur un faible
nombre de patients une amélioration significative du VEMS et de la capacité
vitale ainsi qu’une réduction du volume d’expectoration après 8 semaines de
traitement.
Celui-ci n’a eu aucun effet sur la concentration des germes
pathogènes, des polynucléaires neutrophiles, d’IL ou de tumor necrosis factor
(TNF)-alpha.
Ces données sont préliminaires et n’autorisent aucune recommandation
actuellement.
C’est la seule étude sur les bronchectasies.
D - Traiter les complications non infectieuses :
– La chirurgie des bronchectasies est possible.
La série d’Agasthian, portant
sur 130 patients opérés en raison de l’échec du traitement médical,
d’hémoptysies, d’un abcès pulmonaire ou d’une masse restée sans diagnostic, fait
état d’une mortalité et d’une morbidité périopératoires respectivement de 2,2%
et 24,6%.
Plus de 59% des patients deviennent durablement asymptomatiques
(recul de 1 à 16 ans), 29% se trouvent améliorés.
Pour 12% des patients, la
chirurgie ne modifie pas leur état.
Le traitement chirurgical est proposé dans les
formes localisées, mal tolérées ou compliquées.
– Le contrôle des hémoptysies n’a fait l’objet d’aucune étude spécifique dans
les bronchectasies.
Les solutions vasoconstrictives (exemple : terlipressine) sont
couramment utilisées et ont démontré en pratique leur utilité mais n’ont pas
l’autorisation de mise sur le marché (AMM) dans cette indication.
L’embolisation
des artères bronchiques se justifie devant une hémoptysie grave.
Cette technique
n’évite pas les récidives à long terme mais a l’avantage d’être immédiatement
efficace et de pouvoir être renouvelée.
Elle n’est pas exempte de
complications.
– L’aspect nutritionnel de cette affection n’a fait l’objet d’aucune étude alors
même que la déperdition protidique est conséquente.
E - Gérer l’insuffisance respiratoire
:
Les résultats de la ventilation nasale intermittente (VNI) dans la dilatation des
bronches ont été rapportés.
Cette aide ventilatoire a permis la stabilisation des
paramètres gazométriques artériels et la réduction du nombre de jours
d’hospitalisation.
Dans l’étude de Gacouin, la mise en route de la VNI permet
de ramener les paramètres gazométriques artériels au niveau qui prévalait avant
la décompensation respiratoire, et ce durablement, sans pour autant normaliser
les gaz du sang artériel.
Conclusion
:
Les dilatations des bronches peuvent être confondues avec d’autres causes de
suppuration bronchique.
Cette confusion peut être évitée par une analyse
anamnestique et clinique correcte, et le recours à l’imagerie (TDM-HR).
Le
traitement repose sur le drainage bronchique régulier complété au besoin par le
contrôle des infections bactériennes.
L’évolution vers l’insuffisance respiratoire est responsable d’une diminution de
l’espérance de vie chez beaucoup d’entre eux.