Dermatoses liées à Malassezia furfur Cours de dermatologie
Introduction
:
M. furfur est une levure, appelée autrefois Pityrosporon (P.) ovale.
Si
les affections à M. furfur sont fréquentes et banales, leur
physiopathologie est encore l’objet de débats animés.
Parmi les
affections liées à M. furfur, deux prédominent nettement : le
pityriasis versicolor, où M. furfur paraît directement pathogène, et
la dermatite séborrhéique, où le mode d’intervention de cette levure
n’est pas clair.
Le diagnostic de ces affections est essentiellement
clinique mais peut être appuyé par des examens complémentaires.
Le traitement est essentiellement, mais pas exclusivement,
antifongique.
Historique de la taxonomie des levures
du genre Malassezia :
Un rappel historique paraît nécessaire pour expliquer la confusion
qui entoure l’isolement de M. furfur.
En 1801, Willan identifie le pityriasis versicolor.
En 1846, Eichsted
montre qu’un agent fongique est cause du pityriasis versicolor.
En
1853, Robin le nomme Microsporon furfur.
La nature dermatophytique était alors admise.
Le nom Microsporon, était
d’ailleurs mal orthographié‚ car il aurait fallu écrire microsporum
furfur (grain de blé en latin, correspondant à l’aspect des squames).
En 1874, Malassez reconnaît un agent levuriforme inconnu au sein
des squames et sur les cheveux des patients atteints de pityriasis
capitis.
En 1884, Bizzozero le nomme Saccharomyces ovalis. Baillon,
en 1889, décrit le genre M. et identifie le microsporum malassezii
comme agent du pityriasis capitis.
En 1904, Sabouraud décrit le
genre P. (du grec pityron : grain de blé).
Ainsi, naît le P. malassezi en lieu et place de microsporum malassezii.
Castellani et Chalmer, en
1913, débaptisent P. malassezii et le nommeront P. ovale. Weidman,
en 1925, isole et cultive à partir de squames de peau de rhinocéros
P. pachydermatis qui sera par la suite isolé sur la peau de nombreux
animaux (mammifères et oiseaux) mais aussi d’êtres humains et
dont la similarité biologique avec P. ovale est très importante.
Panja
en 1927, cultive pour la première fois P. ovale.
En 1939, Benham
montre qu’il s’agit d’une levure lipophile et que la culture est
favorisée par l’apport d’acide gras.
Gordon, en 1951, crée le terme P. orbiculare et rattache aux P. ovale et orbiculare pityriasis versicolor
et pityriasis capitis.
Ces deux levures sont considérées comme
anthropophiles et lipodépendantes ; P. pachydermatis est considéré
comme une espèce zoophile non lipodépendante.
Par la suite, sera
isolé P. canis.
Finalement, en 1995, Guillot et Gueho pourront identifier sept
espèces génétiques de M. appartenant à la famille des
basidiomycètes : M. furfur (ex-P. ovale et ex-P. orbiculare), M.
pachydermatis (ex-P. pachydermatis et ex-P. canis), M. sympodialis,
M. globosa, M. obtusa, M. restricta, M. sloofiae.
Cette classification
repose sur l’étude des séquences de l’acide ribonucléique (ARN) ribosomial 26S et de l’acide désoxyribonucléique (ADN) nucléaire
de ces levures lipophiles saprophytes obligatoires de la peau
humaine ou d’animaux (mammifères et/ou oiseaux) et jamais
isolées dans l’environnement.
Pathologie liée à Malassezia furfur :
A -
PITYRIASIS VERSICOLOR :
Il s’agit d’une affection cosmopolite, fréquente, de l’adolescent et de
l’adulte jeune des deux sexes, favorisée par l’humidité, la chaleur,
l’exposition au soleil, l’hypercorticisme, l’application de topiques
gras et la grossesse.
Les lésions sont habituellement localisées sur le thorax, le cou, la
racine des membres.
Des formes plus diffuses peuvent être
observées.
Classiquement, les paumes et les plantes ne sont jamais atteintes mais le visage peut parfois l’être.
L’aspect clinique est
évoqué par le nom même de cette affection : pityriasis =
desquamation fine, versicolor = atteinte variable.
Il s’agit de lésions
maculeuses, très rarement en relief, à desquamation furfuracée, que
l’on peut mettre en évidence par le signe du « copeau » : lorsque le
frottement appuyé, détache sans hémorragie un lambeau
épidermique adhérent.
La couleur est rosâtre, jaunâtre, chamois ou
fauve chez des sujets leucodermes.
Il peut y avoir au contraire une
dépigmentation, surtout chez les patients dont la peau est foncée.
Il existe toutefois des formes hyperpigmentées chez les
patients à peau sombre.
Enfin, des formes polychromes
peuvent se voir chez un même individu.
Initialement, les macules
sont périfolliculaires, puis forment de vastes macules au bord
émietté pouvant ultérieurement confluer.
B - DERMATITE SÉBORRHÉIQUE :
Ce terme doit être préféré à dermite séborrhéique (pourtant plus
utilisé), eczéma séborrhéique ou dermatite séborrhoïde.
1- Dermatite séborrhéique de l’adulte :
Il s’agit d’une affection très fréquente touchant 1 à 3% de la
population, représentant 3 à 10% des consultations
dermatologiques, débutant lors de la puberté, rare chez le vieillard,
atteignant plus les hommes que les femmes, dont les poussées sont
volontiers hivernales.
La lésion élémentaire est érythématosquameuse, aux bords imprécis,
la squame étant grasse (d’où le terme séborrhéique).
Il s’agit d’une
dermatose essentiellement faciale.
La topographie élective est le
sillon nasogénien, le pli sus-labial, les sillons intersourciliers, les
sourcils, la lisière du cuir chevelu, des sillons rétroauriculaires.
Parfois, il peut exister une atteinte des joues, du menton et de la
lèvre supérieure, lorsque le patient est porteur d’une barbe ou de
moustaches.
La dermatite séborrhéique peut ne pas être
symptomatique ou être à l’origine de picotements, brûlures, prurit,
ou d’une intolérance aux cosmétiques et notamment aux détergents.
L’évolution est chronique, alternant rémissions et poussées.
L’association avec un pityriasis capitis est fréquente et celui-ci est
aujourd’hui considéré comme partie intégrante de la dermatite
séborrhéique.
Il existe des particularités topographiques :
– lésions médiosternales d’évolution souvent centrifuge formant la
dermatose figurée médiothoracique de Brocq, d’évolution parfois
achromiante ;
– atteinte dorsale interscapulaire, pouvant parfois diffuser à
l’ensemble du thorax mimant un pityriasis rosé de Gibert ;
– atteinte des zones pileuses pubiennes, axillaires, interfessières ;
– atteinte du conduit auditif externe occasionnant un prurit
volontiers sévère entraînant des lésions de grattage, dont la
surinfection peut conduire à une otite du conduit auditif externe ;
– blépharite ciliaire se manifestant sous la forme de squames grasses
autour des cils sur une base érythémateuse ;
– atteinte des organes génitaux externes (dont la réalité est discutée).
Chez les malades parkinsoniens ou traités par neuroleptiques,
l’hyperséborrhée est majeure et des manifestations de dermatite
séborrhéique sont volontiers profuses et permettent parfois de faire
le diagnostic neurologique.
Chez les sidéens, la dermatite séborrhéique se présente volontiers
sous forme de lésions très diffuses, souvent aussi à distance de la
tête, résistant aux traitements.
Elle est moins fréquente depuis
la trithérapie.
Chez ces patients, le nombre de levures est diminué
sur la peau et le rôle de M. furfur n’est donc pas évident.
La dermatite séborrhéique est plus fréquente chez les malades
atteints de cancer des voies aérodigestives supérieures et les
malades dépressifs.
Chez tous ces patients, une dermatite
séborrhéique peut être le révélateur du diagnostic et il faut savoir y
penser devant un contexte particulier.
2- Dermatite séborrhéique de l’enfant :
La dermatite séborrhéique de l’enfant est très différente de celle de
l’adulte par sa topographie et son évolution.
Il s’agit probablement
d’une entité autonome, mais certains la considèrent comme une
variante de la dermatite atopique ou du psoriasis.
La lésion élémentaire est érythématosquameuse.
Il s’agit de larges
plaques avec des squames grasses localisées au cuir chevelu (croûtes
de lait) ou au visage.
Un érythème fessier est parfois associé et on
parle alors d’atteinte bipolaire.
Une atteinte des grands plis ainsi
que des éléments figurés peuvent s’y adjoindre.
L’état général est
bon. Il n’y a classiquement pas de prurit. Enfin, on peut observer
une atteinte généralisée sous la forme d’une érythrodermie
desquamative de Leiner Mousous de moins en moins fréquente à
l’heure actuelle.
La dermatite séborrhéique du nourrisson est
souvent longue à traiter mais elle est moins récidivante que celle de
l’adulte et disparaît avec l’âge.
Cependant Tollesson ne retrouve
pas de diminution du nombre de colonies cutanées de M. furfur
1 an après guérison de dermatite séborrhéique chez 21 enfants.
C - PITYRIASIS CAPITIS :
Il s’agit en fait de la dermatite séborrhéique du cuir chevelu dont les
manifestations cliniques vont du simple pityriasis capitis ou
pityriasis capitis simplex, dont les squames fines poudrent les
épaules et les cheveux (pellicules), jusqu’à la pseudoteigne
amiantacée‚ en passant par le pityriasis gras, dont les larges squames
grasses formant la classique couronne séborrhéique du cuir chevelu
peuvent être malodorantes.
D - FOLLICULITES PITYROSPORIQUES :
Le terme « pityrosporique » est source de confusion et le terme de
folliculite à M. furfur paraît plus approprié.
1- Folliculites des adultes :
Il s’agit d’une ostiofolliculite localisée plus particulièrement au dos
et aux épaules chez l’adulte d’âge moyen.
À la différence de
l’acné, il n’y a ni comédon ni microkyste. Les lésions sont
généralement asymptomatiques, parfois prurigineuses.
La
fréquence de cette dermatose, ne survenant pas sur un terrain
particulier, est difficile à apprécier, sous-estimée pour certains, surestimée
pour d’autres.
Il faut surtout savoir y penser devant une
folliculite résistant aux traitements habituels.
La réponse aux
antifungiques locaux est rapide.
Cependant, M. furfur a été isolé
dans des follicules pileux de malades atteints d’acné vulgaire et
cortisonée, ce qui rend nécessaire l’établissement de critères diagnostiques
précis.
2- Pustuloses néonatales à Malassezia furfur
:
Elles sont d’individualisation plus récente.
Il s’agit de pustules
céphaliques, monomorphes, dont les critères diagnostiques reposent
pour Taieb et al sur :
– une localisation à la face et au coude ;
– un âge inférieur à 1 mois ;
– l’isolement de M. furfur à l’examen direct ;
– l’élimination des autres causes de pustules néonatales ;
– une réponse aux imidazolés topiques.
Les diagnostics différentiels sont avant tout les pustules infectieuses
néonatales (pustules à Staphylococcus aureus, Listeria monocytogenes,
Streptococcus de tout type, Candida albicans, Pseudomonas
aeruginosa, Treponema pallidum, herpès, gale) mais aussi les autres
pustuloses que sont l’acropustulose infantile, l’érythème toxique
néonatal, la mélanose pustuleuse néonatale transitoire.
Cependant,
le principal diagnostic différentiel est l’acné néonatale qui, à la
différence de la pustulose néonatale à M. furfur, présente des
comédons ouverts et fermés.
E - DERMATOSES ASSOCIÉES À MALASSEZIA FURFUR
:
1- Sébopsoriasis :
Il s’agit d’un psoriasis localisé sur les zones séborrhéiques, c’est-àdire
dont la localisation est identique à celle d’une dermatite
séborrhéique.
Seules d’autres localisations typiques du psoriasis
permettent de poser un diagnostic de certitude car l’histologie et le
traitement d’épreuve ne permettent généralement pas de trancher
entre dermatite séborrhéique et sébopsoriasis.
Un phénomène de Koebner expliquerait cette topographie particulière de psoriasis.
Le
rôle de M. furfur n’est pas clair.
2- Prurigo atopique séborrhéique
:
Il s’agit d’un eczéma atopique de l’adulte, plus particulièrement de
la femme localisé aux zones séborrhéiques avec des lésions excoriées
dans les zones séborrhéiques du visage et la nuque (head and neck
dermatitis).
Généralement, les prick-tests à M. furfur sont
positifs.
Il y a effectivement une induction par M. furfur de la
production des cytokines induisant la dermatite atopique (IL4, IL10)
et de la synthèse d’IgE.
Les imidazolés, par leur effet
thérapeutique tout à fait satisfaisant, confirment le diagnostic.
Toutefois, d’autres facteurs que M. furfur, sueur, chaleur, stress,
exposition solaire aggravent cette pathologie.
F - AUTRES AFFECTIONS À MALASSEZIA FURFUR
:
1- Papillomatose réticulée de Gougerot et Carteaud
:
Il s’agit d’une dermatose bénigne, rare, dont les lésions élémentaires
sont des maculopapules pigmentées disposées symétriquement en
réseau autour de la zone médiane du tronc.
Histologiquement, on
note une hyperkératose et une papillomatose sans acanthose.
Chez
quelques patients, M. furfur a été isolé.
Le diagnostic différentiel
peut être discuté avec un pityriasis versicolor papillomateux mais il
n’y a pas de fluorescence en lumière de Wood.
2- Septicémies :
Des septicémies à M. furfur mais aussi à M. pachydermatis ont été
décrites récemment, surtout chez des nouveau-nés en réanimation
recevant des lipides par voie parentérale au moyen de cathéter
vasculaire.
L’isolement de Malassezia après hémocultures classiques
est impossible car cette levure lipophile a besoin d’un milieu enrichi
en acide gras. Une étude récente portant sur la mise en cultures
systématique sur un milieu adapté de 1 609 cathéters a permis de
retrouver des levures de type M. furfur sur 38 cathéters.
La
contamination s’effectue a priori à partir de la peau adjacente au
cathéter.
G - AFFECTIONS DUES À MALASSEZIA PACHYDERMATIS
:
Il s’agit d’un saprophyte animal occasionnant des dermatoses
prurigineuses et des otites externes chez de nombreux mammifères,
notamment le rhinocéros et le chien mais aussi chez des oiseaux.
Il a
été isolé chez l’homme sur des frottis d’oreille, de peau, de vagin
mais aussi des expectorations et des hémocultures.
Cette levure a
une lipophilie moins absolue que M. furfur et peut être cultivée sur
un milieu de Sabouraud et donc plus facilement isolée en routine.
Examens complémentaires
:
Le diagnostic est, dans l’immense majorité des cas, clinique.
Les
examens décrits, hormis les deux premiers, n’ont qu’un
intérêt anecdotique.
A - EXAMEN EN LUMIÈRE DE WOOD :
Il s’agit d’un examen simple et facile à réaliser au cours d’une
consultation dermatologique devant un pityriasis versicolor.
Il
consiste à mettre en évidence une fluorescence jaune verdâtre après
éclairage par des rayons ultraviolets de 360 nm de longueur d’onde.
La synthèse de phorphyrines par les levures expliquerait cette
fluorescence.
Les lésions infracliniques sont généralement révélées
au cours de cet examen.
B - SCOTCH-TEST :
Cette méthode, mise au point en 1957 par Vanbrenseghem, consiste
à appliquer fortement un film adhésif sur les lésions, puis à
appliquer celui-ci sur une lame porte-objet et à faire un examen
direct au microscope.
On peut éventuellement appliquer au
préalable sur la lame une gouttelette de bleu de lactophénol afin de
colorer, pour identifier plus facilement les levures.
On met en
évidence des blastospores rondes, ovales, réfringentes, avec un
aspect de grappe de raisin. Les spores mesurent de 2 à 5 ím de
diamètre.
On observe des enchevêtrements de filaments épais tout à
fait typiques.
Cette technique est pratique pour poser le diagnostic
mycologique du pityriasis versicolor.
En zone pileuse, un curetage
préalable est préférable.
C - EXAMEN DIRECT :
Les squames sont prélevées à la curette.
L’application de potasse à
30 % les rend transparentes et permet de visualiser les spores au
microscope avec un aspect similaire à celui observé au cours du
scotch-test.
D - CULTURES :
Plusieurs milieux de cultures sont à notre disposition.
Le milieu le
plus utilisé est le milieu de Sabouraud recouvert d’huile d’olive
vierge.
Après 1 ou 2 semaines d’incubation à 37 °C, on observe un
tapis blanchâtre.
Après coloration de May-Grünwald-Giemsa, on
constate la présence de petites levures de 1,5 à 4 ím de diamètre
ayant l’aspect de bouchons de champagne.
Les autres milieux, réservés à des laboratoires plus spécialisés sont :
– le milieu de Sabouraud, concentré à 1 % d’huile d’olive, qui
permet une identification de colonies en dôme couleur chamois ;
– le milieu de Dickson, modifié ou le corps gras est un twin inclus
dans une gélose, où les cultures ont un aspect lisse, plan, en
« noisette » ;
– enfin, le milieu de Leeming, habituellement utilisé pour tester la
sensibilité de M. furfur aux antifongiques.
E - EXAMEN ANATOMOPATHOLOGIQUE :
1- Pityriasis versicolor :
Il est mis en évidence des filaments, notamment après coloration à
l’acide périodique Shiff (PAS) dans la couche cornée, ainsi qu’une
exocytose lymphocytaire épidermique. Mais la levure est aussi très
bien observée en coloration standard du fait de sa basophilie.
2- Dermatite séborrhéique
:
L’aspect est peu spécifique et peut évoquer un eczéma ou un
psoriasis sans abcès de Monro, avec une acanthose et quelques
points de parakératose focale.
De discrets infiltrats lymphocytaires périvasculaires peuvent être associés à une exocytose.
Physiopathologie :
A - PITYRIASIS VERSICOLOR :
Les levures M. furfur sont localisées dans la couche cornée des
follicules pileux.
Le blocage de la synthèse et le transfert de mélanine
des mélanocytes vers les kératinocytes explique probablement les
formes achromiantes.
La synthèse d’acide azélaïque par M. furfur
pourrait expliquer ce mécanisme.
Les formes hyperchromiantes sont
en partie secondaires à un épaississement de la couche cornée. Pour
certains, il existe probablement des effets des levures sur les
mélanocytes dont la nature n’est pas connue à ce jour.
D’autre part,
certaines souches de M. furfur sont capables, à partir de
L-tryptophane et de lipides de fabriquer un pigment brun.
B - DERMATITE SÉBORRHÉIQUE
:
L’hypothèse d’une hyperséborrhée à l’origine de la dermatite
séborrhéique est actuellement abandonnée.
Elle reposait sur la
topographie séborrhéique des lésions chez des patients présentant
une hyperséborrhée tels que les parkinsoniens ou les patients traités
par neuroleptiques, ou l’apparition de la dermatite séborrhéique à
l’âge où la sécrétion sébacée est importante (période néonatale,
adolescence).
Cependant, les patients acnéiques n’ont pas plus que
les autres de dermatite séborrhéique.
La composition du sébum est
normale lors de la dermatite séborrhéique et le flux sébacé n’est pas
différent dans les zones atteintes et les zones non atteintes.
D’autres
facteurs ont par ailleurs été incriminés : climatiques (hivers),
hormones sexuelles (lors de la période néonatale et lors de
l’adolescence), neurologiques (description de l’atteinte unilatérale
associée à des lésions trigéminées unilatérales), immunologiques
(dermatite séborrhéique profuse lors du sida).
Cependant, M. furfur reste l’agent étiologique actuellement le plus
probable.
Les territoires atteints sont les sites électifs de cette levure
lipophile (zone d’hyperséborrhée).
La concentration de M. furfur est
proportionnellement beaucoup plus importante que les autres
saprophytes sur les zones atteintes de dermatite séborrhéique.
L’évolution du nombre de colonies est parallèle à celle des lésions,
notamment sous l’effet des traitements locaux mais aussi généraux.
On retient actuellement que M. furfur est responsable de la
dermatite séborrhéique plus par l’induction d’une réaction
immunitaire que par une infection cutanée vraie.
D’ailleurs, l’aspect
histologique est plus proche de l’eczéma que d’une affection
fongique.
La structure antigénique de M. furfur est complexe.
La
réponse qu’elle induirait est difficile à appréhender car tous les
individus adultes présentent des anticorps dirigés contre M. furfur
et ont des tests de transformation lymphoblastique positifs.
Par
ailleurs, M. furfur active le complément par la voie alterne et exerce
une action lipasique.
Enfin, il a été mis en évidence que des lysats
de M. furfur pouvaient induire des lésions de dermatite
séborrhéique.
Traitements :
A - ANTIFONGIQUES :
Les imidazolés topiques (kétoconazole, bifonazole, fluconazole sous
la forme de crème, gel, lotion, shampooing) ou le sulfure de
sélénium ou la ciclopiroxolamine sont les plus utilisés.
Il a été
démontré qu’ils étaient plus efficaces que leur excipient. Le taux d’efficacité thérapeutique se situe entre 70 et 100 %. Le kétoconazole peut être aussi prescrit sous forme orale à la posologie
de 200 mg/j pour des durées inférieures à 15 jours dans les formes
rebelles ou récidivantes.
Pour l’instant, seul le kétoconazole a reçu
l’autorisation de mise sur le marché pour les infections cutanées à
M. furfur.
La terbinafine semble aussi efficace et mieux tolérée.
D’autres antifongiques topiques ont une action sur M. furfur : le
sulfure de sélénium, la pirythione zinc, la piroctone olamine.
L’efficacité du sulfure de sélénium est similaire à celle du kétoconazole.
B - AUTRES TRAITEMENTS :
1- Corticoïdes locaux
:
Leur efficacité est similaire à celle des imidazolés dans la dermatite
séborrhéique mais les risques de corticodépendance réduisent leur
prescription, qui est même contre-indiquée pour certains.
2- Peroxyde de benzoyle
:
À 2,5 ou 5 % à raison de deux applications par semaine, il a montré
une certaine efficacité avec une tolérance satisfaisante dans le
traitement de la dermatite séborrhéique.
3- Acide salicylique
:
Il est utilisé essentiellement sous forme de shampooing pour le
traitement des pityriasis capitis. Sa concentration est alors inférieure
à 2 %.
L’effet kératolytique recherché est modeste compte tenu de la
brièveté de l’application du topique, mais bien réel.
Il est par ailleurs
déconseillé chez le jeune enfant, en raison des risques d’absorption
percutanée.
4- Autres kératolytiques :
Sous la forme de crème ou parfois de shampooing, on peut
préconiser les alphahydroxyacides, le keluamide, le biolysat hafnia
ou l’acide uncadécylénique.
À notre connaissance, il n’y a pas eu
d’étude randomisée. Les traitements par goudrons sont désormais
proscrits du fait d’une possible cancérogénicité.
5- Indications thérapeutiques en fonction des
manifestations cliniques :
Le traitement du pityriasis versicolor repose avant tout sur
l’utilisation d’imidazolés locaux ou de sulfure de sélénium.
Dans le
pityriasis versicolor, le traitement au meilleur rapport coût/efficacité
ou confort/efficacité est le kétoconazole en application unique sous
forme de gel moussant.
Le traitement général par kétoconazole doit
être réservé à des formes particulièrement rebelles.
Il n’existe pas de traitement schématisé de la dermatite séborrhéique
de l’adulte, tant les possibilités sont nombreuses. Une étude des
nombreux articles relatifs à ce sujet permet toutefois de dégager
quelques tendances.
Le traitement de la dermatite séborrhéique
repose avant tout sur les imidazolés locaux dont la galénique est
adaptée à la topographie de la dermatite séborrhéique (crème pour
le visage, shampooing pour le cuir chevelu, gel moussant pour les
deux) mais d’autres antifongiques peuvent être utilisés, comme la
pyrithione zinc, la piroxolamine, le sulfure de sélénium ou la
ciclopirox olamine.
Tous ces traitements doivent être utilisés
quotidiennement pour les crèmes, deux fois par semaine pendant
2 à 4 semaines puis une fois par semaine pour les shampooings et
les gels moussants.
Les dermocorticoïdes ne doivent être appliqués
que quelques jours ou même être évités.
Des kératolytiques ou des
émollients doivent être proposés comme traitements d’entretien
(tous les jours pour les crèmes, une ou deux fois par semaine pour
les shampooings et les gels moussants).
Il existe peu d’études
clairement démonstratives de leur efficacité.
Une exposition
prudente au soleil est conseillée.
Certains ont proposé l’utilisation
de rétinoïdes per os (isotrétinoïne) ou locaux (rétinaldéhyde).
À l’avenir, il sera probablement intéressant de prescrire des sels de
lithium : succinate ou gluconate.
Chez les sidéens, qui sont parfois porteurs de dermatite
séborrhéique très profuses et très récidivantes, on doit souvent
proposer une PUVAthérapie ou une UVBthérapie ou le kétoconazole
ou la terbinafine.
Auparavant, il faudra avoir essayé les autres
traitements.
Chez des patients parkinsoniens ou traités par neuroleptiques,
l’apport de DOPA ou d’antiparkinsoniens permet une réduction du
flux séborrhéique et des manifestations cliniques de la dermatite
séborrhéique.
Le traitement de la dermatite séborréique du nourrisson repose
avant tout sur des soins d’hygiène (eau et savon) et l’application
d’imidazolés locaux ou d’émollients.
Les dermocorticoïdes doivent
être utilisés de façon limitée.
Les traitements classiques des folliculites à M. furfur néonatales ou
de l’adulte reposent sur les antifongiques locaux de la famille des
imidazolés mais des recidives sont possibles, même après un
traitement oral.
La papillomatose réticulée de Gougerot et Carteaux est
généralement insensible aux imidazolés, ce qui est d’ailleurs contre
tout lien pathogénique avec M. furfur.
Des cas de guérison sous cyclines ou étrétinate ont été rapportés.