Antibiotiques en dermatologie
(Suite) Cours de dermatologie
Streptogramines ou synergistines :
La pristinamycine (Pyostacinet) reste seule commercialisée par voie
orale, après le retrait de la virginiamycine (Staphylomycinet).
Le Synercidt est une association de quinupristine (0,3) et dalfopristine
(0,7) utilisable par voie parentérale.
* Mode d’action
:
Il s’agit d’une association synergique de deux streptogramines,
agissant sur la synthèse du ribosome bactérien.
* Spectre
:
Il ressemble à celui des macrolides : cocci à Gram positif comme
staphylocoques et streptocoques (sauf ceux du groupe D),
pneumocoques, Haemophilus et certains autres bacilles à Gram
négatif, germes intracellulaires comme les mycoplasmes, Chlamydiae,
uréaplasmes, légionelles…
* Indications dermatologiques :
Il s’agit des pyodermites, majoritairement dues aux germes à Gram
positif comme le Staphylococcus aureus et le streptocoque du
groupe A ; infections à Chlamydia ou mycoplasmes.
Le Synercidt est
réservé aux cas où il n’existe pas d’autre antibiotique efficace.
* Indications non dermatologiques
:
Il s’agit des infections à germes sensibles, essentiellement dans leurs
localisations oto-rhino-laryngologiques (ORL) (sinusites) et
pulmonaires.
* Contre-indications :
Ce sont l’hypersensibilité à la pristinamycine ou à la virginiamycine.
* Interactions médicamenteuses :
Elles concernent la ciclosporine, dont les taux sériques augmentent
par diminution du catabolisme.
* Effets indésirables :
Ils sont essentiellement d’ordre digestif.
Les manifestations cutanées
consistent en des exanthèmes maculopapuleux, ou surtout des
pustuloses exanthématiques aiguës généralisées.
Celles-ci peuvent
faire suite à une sensibilisation cutanée préalable avec la virginiamycine, se manifestant par un eczéma de contact allergique.
Lincosanides :
Elles groupent deux molécules : la clindamycine (Dalacinet) et la
lincomycine (Lincocinet).
* Mode d’action :
Elles sont bactériostatiques par inhibition de la synthèse protéique
bactérienne.
De plus, elles inhibent la synthèse des toxines
bactériennes, facilitent la phagocytose du Streptococcus pyogenes,
suppriment la synthèse des protéines porteuses de la pénicilline
facteurs de résistance, et diminuent la synthèse de tumor necrosis
factor (TNF)-alpha induite par les lipopolysaccharides bactériens.
* Spectre d’action :
Il concerne les staphylocoques méti-S, streptocoques, chlamydiae,
mycoplasmes, les germes anaérobies comme le Clostridium
perfringens et les propionibactéries, ainsi que le Toxoplasma gondii.
* Pharmacocinétique :
Leur diffusion dans les tissus mous et leur propriétés antitoxiniques
font d’elles un choix intéressant dans le traitement des dermohypodermites
bactériennes dans la genèse desquelles intervient une
surinfection à germes anaérobies.
* Indications dermatologiques :
En association intraveineuse avec la pénicilline G, c’est le traitement
de première intention des dermohypodermites bactériennes
nécrosantes et fasciites nécrosantes des membres et de la région
cervicofaciale.
Ceci se justifie par l’action antianaérobies et anti-TNFalpha
de l’antibiotique, dont la pénétration au sein du foyer
infectieux est meilleure que celle de la pénicilline G, malgré la
possibilité théorique d’indifférence, voire d’antagonisme de
l’association antibiotique.
* Indications non dermatologiques :
Elles sont limitées aux infections graves à germes sensibles.
Indications des traitements topiques
Par voie topique, on utilise la clindamycine en solution dans l’acné
inflammatoire (Dalacine T Topict).
* Effets indésirables :
Les effets digestifs sont au premier plan, la colite
pseudomembraneuse à Clostridium difficile survenant pour 0,1 à 10 %
des traitements étant la plus grave, bien que curable par la
vancomycine per os.
Les autres effets indésirables sont
hématologiques (cytopénie) ou cutanés bénins (prurit, urticaire ou
exanthèmes maculopapuleux).
Les autres éruptions (réactions anaphylactoïdes, syndrome de Stevens-Johnson) sont rares.
On a
aussi décrit fièvre, hypotension, cytolyse hépatique ou blocage
neuromusculaire par effet direct sur la plaque motrice.
Fluoroquinolones :
Ces antibiotiques synthétiques résultent de la fixation d’un atome
de fluor en position 6 et d’un cycle pipérazine ou pyrrolidine sur les
anciennes quinolones que sont les acides nalidixique et pipémidique.
On dénombre plusieurs molécules disponibles : norfloxacine,
péfloxacine, ciprofloxacine, ofloxacine, loméfloxacine, énoxacine,
moxifloxacine, lévofloxacine, sparfloxacine et fléroxacine.
* Mode d’action
:
Ce sont des molécules bactéricides, inhibant l’acide désoxyribonucléique
(ADN)-gyrase bactérienne (topo-isomérase II).
* Pharmacocinétique :
Toutes possèdent une excellente biodisponibilité, excepté la ciprofloxacine qui est absorbée au maximum à 84 %.
La voie
parentérale est donc souvent inutile, sauf en cas de troubles
digestifs.
La diffusion tissulaire des fluoroquinolones est bonne, en
particulier dans la peau, le cartilage et l’os.
La demi-vie souvent
longue permet une administration biquotidienne la plupart du
temps.
* Spectre d’action :
Leur spectre antimicrobien est à quelques exceptions près
superposable.
Il englobe les Staphylococcus aureus méti-S pour
lesquels les résistances, plasmidiques, sont de plus en plus
nombreuses.
Les Staphylococcus aureus méti-R et les streptocoques
doivent être considérés comme résistants aux fluoroquinolones, tout
comme les germes anaérobies.
L’activité des fluoroquinolones est
surtout notable envers les coques et bacilles à Gram négatif et les
germes intracellulaires ; entérobactéries, Haemophilus, Acinetobacter,
Pseudomonas aeruginosa (seulement pour la ciprofloxacine, mais la
sélection de mutants résistants justifie parfois l’association à un autre
antibiotique), gonocoques, Haemophilus ducreyi, Legionella et
Chlamydiae.
* Particularités des molécules disponibles
:
La péfloxacine et son métabolite principal la norfloxacine ont des
indications limitées aux infections urinaires et/ou prostatiques, ainsi
qu’aux gonococcies cervicales et urétrales non compliquées.
Le
dermatologiste doit réserver l’usage de la péfloxacine aux
prostatites, en raison de son excellente diffusion dans le
parenchyme.
La posologie de la péfloxacine doit être réduite de
moitié chez le sujet de plus de 70 ans.
La rosoxacine a deux
indications : traitement minute des gonococcies, et celui des
infections intestinales.
L’énoxacine est utilisée dans le traitement des
urétrites gonococciques masculines (200 à 400 mg selon le poids, en
dose unique) et des prostatites (800 mg/j).
L’activité de l’ofloxacine
sur Chlamydia trachomatis et Ureaplasma urealyticum est meilleure
que celle des autres fluoroquinolones : 2 X 200 mg d’ofloxacine ou
2 X 100 mg de doxycycline durant 7 jours permettent une réponse
microbiologique dans 97 % des cas d’urétrites à Chlamydia.
La ciprofloxacine a une activité sur le Pseudomonas aeruginosa et n’offre
d’intérêt pour le dermatologue que dans le traitement minute des
urétrites gonococciques, d’autant qu’elle est efficace sur les
localisations rectales et pharyngées du gonocoque.
La sparfloxacine,
dont le spectre est élargi au pneumocoque, est un photosensibilisant
majeur : son utilisation se restreint au traitement des pneumopathies
communautaires, mais elle possède une bonne activité sur les
mycobactéries.
Le fléroxacine s’administre en une prise unique de
400mg/j et son activité s’exerce sur la plupart des Staphylococcus
aureus et des entérobactéries rencontrées dans les infections cutanées
ou des tissus mous.
* Indications dermatologiques :
Outre leur utilisation courante dans les urétrites gonococciques et
les prostatites aiguës et chroniques, ces molécules sont devenues
essentielles dans le traitement des infections ostéoarticulaires aiguës
ou chroniques.
Les fluoroquinolones sont ainsi particulièrement
utiles au dermatologiste qui doit traiter une ostéite sous-jacente à
un mal perforant plantaire, dû à Staphylococcus aureus, à
Pseudomonas aeruginosa ou à d’autres à bacilles à Gram négatif
sensibles.
L’activité sur les mycobactéries tuberculeuses est variable
et inégale selon les molécules : nulle pour la péfloxacine, modérée pour la ciprofloxacine et l’ofloxacine, bonne pour la sparfloxacine.
Concernant les mycobactéries atypiques, les données sont
discordantes, avec des résultats cliniques variables.
* Indications extradermatologiques :
Ce sont les infections sévères, osseuses, digestives, urinaires et
génitales, dues aux bacilles à Gram négatif et staphylocoques dorés.
L’utilisation des fluoroquinolones a été récemment réglementée, par
exemple limitée aux sinusites, pneumonies communautaires et
exacerbation de bronchites chroniques pour la moxifloxacine.
* Indications des traitements topiques :
Ils sont réservés à l’usage ophtalmologique et auriculaire.
* Effets indésirables
:
Les tendinopathies, plus fréquentes avec la péfloxacine, peuvent
apparaître dès le premier jour de traitement : elles siègent le plus
souvent au tendon d’Achille et peuvent en entraîner la rupture.
Le
risque est majoré chez les hommes de plus de 60 ans, transplantés
rénaux, traités par corticoïdes, sportifs ou aux antécédents de
tendinite.
La phototoxicité est due aux ultraviolets A, majeure avec
la sparfloxacine, même lors d’expositions solaires très limitées.
La
durée de persistance de la photosensibilité est variable, jusqu’à
11 jours après l’arrêt. Les autres effets indésirables sont moins
fréquents.
Le « syndrome de la témafloxacine » consistait en une
anémie hémolytique auto-immune entraînant un ictère accompagné
de fièvre, d’insuffisance rénale et hépatique, de coagulopathie et de
troubles neurologiques, survenant chez 1/3 500 malades traités par
cette molécule.
Les effets neuropsychiatriques, plus fréquents avec
la péfloxacine, apparaissent 2 à 7 jours après l’induction
thérapeutique : les crises convulsives, syndrome confusionnel,
myoclonies ou délire agité résultent d’un surdosage, parfois par
défaut d’élimination hépatique, plus fréquent chez les sujets âgés.
La réduction de posologie peut les faire céder en 48 heures.
Les
thrombopénies ont été imputées à la péfloxacine.
Dans la
responsabilité des colites pseudomembraneuses associées à une
antibiothérapie, les fluoroquinolones arrivent en seconde position
après les bêtalactamines.
Des manifestations d’hypersensibilité
immédiate allant jusqu’au choc anaphylactique ont été rapportées
avec les diverses molécules.
Les fluoroquinolones ont été impliquées
dans certains cas de syndromes de Lyell ou de Stevens-Johnson.
* Contre-indications
:
Les contre-indications classiques concernent l’enfant jusqu’à la fin
de la croissance, la grossesse et l’allaitement de par la fixation des fluoroquinolones sur les cartilages de conjugaison, le déficit en
G6PD, l’épilepsie, les antécédents d’hypersensibilité aux quinolones
ou de tendinopathie avec une fluoroquinolone.
Aminosides :
On dispose de l’amikacine, la dibékacine, la gentamycine,
l’isépamicine, la nétilmicine, la spectinomycine, la streptomycine, la
tobramycine pour l’usage systémique.
La néomycine ou framycétine,
la kanamycine, la tobramycine peuvent être utilisées par voie
topique.
* Mode d’action :
Ce sont des antibiotiques bactéricides par inhibition de la synthèse
protéique bactérienne.
* Pharmacocinétique :
Les aminosides utilisés per os ne franchissent pratiquement pas la
paroi intestinale, et ne sont utilisables que par voie parentérale.
Après injection intramusculaire, la résorption à partir du point
d’injection est rapide.
Les pics sériques sont obtenus 1 à 2 heures
après injection, et varient proportionnellement à la dose injectée.
La
demi-vie d’une dizaine d’heures permet deux (voire une) injections
quotidiennes, de préférence en perfusion intraveineuse de
30 minutes. L’élimination est surtout rénale.
En cas d’insuffisance
rénale, on assiste à une élévation du pic sérique et à une
augmentation de la durée d’élimination, ce qui nécessite d’espacer
les administrations en fonction de la clairance de la créatinine.
* Spectre d’action
:
Ces antibiotiques à large spectre sont inefficaces sur les germes
anaérobies, les streptocoques, les staphylocoques méti-R.
En
revanche, l’association pénicilline/aminoside est synergique sur le
streptocoque, la bêtalactamine permettant la pénétration
transpariétale de l’aminoside.
* Indications dermatologiques :
En monothérapie, on peut utiliser la spectinomycine (Trobicinet)
dans l’urétrite ou la cervicite gonococcique (2 g en administration
unique).
Les aminosides sont utilisables en association avec un autre
antibiotique, le plus souvent une bêtalactamine, dans les infections
graves à staphylocoque présumé méti-S (staphylococcie maligne de
la face) ou à streptocoques (dermohypodermite ou fasciite
nécrosantes), ainsi que chez les malades neutropéniques.
* Indications non dermatologiques :
On les réserve aux infections graves à germes essentiellement à
Gram négatif, le plus souvent en association à une bêtalactamine.
* Indications des traitements topiques :
La néomycine ou framycétine est présente dans de nombreux
topiques médicamenteux utilisés dans les infections cutanées,
muqueuses, ORL ou ophtalmiques à bactéries présumées sensibles
(Staphylococcus aureus méti-S, certains bacilles à Gram négatif).
D’efficacité le plus souvent dérisoire, du moins dans les affections
dermatologiques, elle est inductrice d’eczémas de contact
allergiques.
* Effets indésirables
:
Les principaux effets sont dus à une toxicité cumulative.
L’insuffisance rénale résulte d’une tubulopathie aiguë, réversible à
l’arrêt du traitement.
L’atteinte cochléovestibulaire résulte d’une
toxicité cumulative.
Survenant sur des malades génétiquement
prédisposés, elle est irréversible.
Les eczémas de contact, induits le plus souvent par la néomycine,
entraînent un risque d’hypersensibilité croisée vis-à-vis des autres
aminosides.
* Contre-indications
:
On retient l’hypersensibilité aux aminosides et la myasthénie.
* Précautions d’emploi particulières :
Il faut évaluer la nécessité du traitement en cas d’insuffisance rénale
ou de déficience auditive.
On adapte l’intervalle d’administration et
on surveille la fonction rénale et l’audition en cas d’insuffisance
rénale.
Cyclines :
La tétracycline-base, première cycline disponible, et les cyclines de
première génération, ont actuellement fait place à des molécules
dites de deuxième génération, de durée de vie plus longue, mieux
absorbées par le tube digestif et à meilleure pénétration tissulaire
car plus lipophiles.
On dispose de lymécycline, doxycycline et
minocycline en dermatologie, ainsi que de la métacycline ou
méthylène-cycline en infectiologie générale.
Il s’agit
vraisemblablement de la classe la plus prescrite par les
dermatologues.
* Mode d’action :
Leur activité antibactérienne est similaire, bactériostatique et ciblée
sur le ribosome bactérien.
Outre l’effet antibiotique, les cyclines
possèdent des propriétés remarquables, justifiant leur emploi dans
les dermatoses non infectieuses ou à mécanismes physiopathologiques
complexes, comme l’acné ou la rosacée.
Il s’agit
d’effets anti-inflammatoires par inhibition de la migration des
polynucléaires neutrophiles et blocage de la production de certaines
cytokines, en particulier kératinocytaires ; d’un effet antilipasique en
particulier sur la lipase produite par Propionibacterium acnes,
diminuant la production des acides gras libres comédogènes et proinflammatoires
; d’un effet anticollagénolytique par inhibition des
métalloprotéases, probablement par chélation des cations nécessaires
au fonctionnement de ces enzymes ; d’une inhibition de
l’angiogenèse.
* Pharmacocinétique
:
Les cyclines ont une excellente pénétration tissulaire.
La prise
s’effectue au cours du repas.
* Spectre :
Le spectre antibactérien des cyclines est large : bactéries à Gram
positif et négatif, germes intracellulaires obligatoires comme
Brucella, Pasteurella, Rickettsia, Chlamydia, Mycoplasma, Ureaplasma,
Legionella…
Leur action est notable sur les tréponèmes, les
spirochètes, le vibrion cholérique. On note une efficacité moindre
sur les mycobactéries (Mycobacterium marinum et Mycobacterium
leprae) et certains protozoaires comme Plasmodium falciparum,
Toxoplasma gondii ou Entamoeba histolytica.
* Particularités des molécules disponibles
:
La lymécycline (tétracycline-méthylène-L-lysine) a une demi-vie
d’environ 10 heures, nécessitant deux prises par jour lors des
traitements anti-infectieux.
La minocycline est la plus lipophile des
cyclines.
Elle offre moins de résistances vis-à-vis de Propionibacterium acnes et de Staphylococcus epidermidis que les autres
cyclines, en particulier la doxycycline.
Ce faible taux pourrait
s’expliquer par la forte concentration moléculaire dans le follicule
pilosébacé.
Il n’y a toutefois pas de conséquences cliniques majeures,
et l’efficacité des différentes molécules semble tout à fait
superposable.
Dans l’acné toutefois, la minocycline semble avoir une
action plus rapide.
* Indications dermatologiques :
Il s’agit d’une antibiothérapie de première intention dans les
infections génitales à Chlamydia ou à mycoplasme.
La dose
préconisée est de 200 mg/j pour la doxycycline, 200 mg/j (plus
efficaces que 100 mg/j) pour la minocycline, avec une durée de
traitement de 7 jours offrant des résultats identiques à un traitement
de 21 jours.
On l’utilise en première intention dans les rickettsioses
et les bartonelloses (maladie des griffes du chat).
Dans les
borrélioses, on lui préfère l’amoxicilline en première intention.
Dans
l’acné à composante inflammatoire, la posologie recommandée de doxycycline ou de minocycline est de 100 mg/j pendant les
3 premiers mois, puis de 100 ou 50 mg/j durant les mois suivants.
L’utilisation simultanée de peroxyde de benzoyle topique est
recommandée par certains auteurs, afin de prévenir et de diminuer
le taux des souches bactériennes résistantes aux cyclines.
Dans la
rosacée, cutanée et/ou oculaire, seule une doxycycline bénéficie à ce
jour d’une autorisation de mise sur le marché (AMM).
La
posologie est identique à celle de l’acné, 100 mg/j durant plusieurs
mois.
Les cyclines y agissent probablement par leur action antiinflammatoire,
et peut-être en inhibant l’angiogenèse.
Certaines
publications signalent une efficacité ponctuelle sur pyoderma
gangrenosum, papillomatose réticulée et confluente de Gougerot et
Carteaud, bulloses auto-immunes…
* Indications extradermatologiques :
Elles sont moins fréquentes : pneumonies à Chlamydiae ou
Mycoplasma, brucellose, paludisme chloroquinorésistant.
* Indications des traitements topiques
:
Signalons l’usage topique de chlortétracycline (Auréomycine
Coopert ou Auréomycine Evanst) dans le traitement d’appoint des
infections cutanées à germes pyogènes.
* Effets indésirables :
Le risque d’ulcérations oesophagiennes contre-indique la prise à
jeun.
Les patientes doivent être averties du risque de candidoses, en
particulier génitales.
La photosensibilité est dose-dépendante ;
fréquente pour la doxycycline, elle semble rare pour la lymécycline,
et exceptionnellement rare pour la minocycline.
Elle entraîne une
éruption monomorphe des zones photoexposées, à type d’érythème
solaire intense, voire une photo-onycholyse.
Les colorations
dentaires surviennent en cas de prise durant les 2 derniers trimestres
de grossesse pour les dents de lait, et durant l’enfance jusqu’à 8 ans
pour les dents définitives.
Une hypertension intracrânienne
réversible peut survenir, surtout en cas d’association, par conséquent
contre-indiquée, avec l’isotrétinoïne orale.
La minocycline induit spécifiquement des vertiges et des
hyperpigmentations cutanées, unguéales ou muqueuses.
On lui
attribue des manifestations systémiques parfois graves.
Les réactions
auto-immunes de lupus induits ou d’hépatites auto-immunes sont
rares, de même que les pseudo-maladies sériques.
Les diverses
manifestations d’hypersensibilité médicamenteuse comportent
pneumopathies avec éosinophilie, hépatites aiguës, néphrites,
syndrome DRESS (syndrome d’hypersensibilité médicamenteuse
idiosyncrasique) : rares mais graves, elles surviennent
spécifiquement avec la minocycline.
Signalons enfin le syndrome de Sweet.
* Contre-indications :
Ces molécules sont contre-indiquées chez la femme enceinte (à partir
du deuxième trimestre) ou allaitant, et chez l’enfant jusqu’à l’âge de
8 ans, en raison du risque de dyschromies dentaires et d’hypoplasie
de l’émail.
L’allergie aux cyclines contre-indique toute la classe
thérapeutique.
Acide fusidique :
Cet antibiotique appartient au groupe des fusidanines, dont il est le
seul représentant.
* Mode d’action :
De structure proche de celle des stéroïdes, cet antibiotique
bactériostatique agit en inhibant la synthèse protéique bactérienne.
* Spectre d’action :
Son spectre antibactérien concerne surtout le Staphylococcus aureus.
Le staphylocoque méti-R est inconstamment sensible (plus de 10 %
de résistances), mais cette donnée est surtout valable en pratique
hospitalière.
* Pharmacocinétique :
Son absorption cutanée est excellente, et permet l’utilisation par voie
topique pour les infections cutanées ou ophtalmiques.
Par voie
digestive, l’absorption est rapide, à 90 %.
L’élimination est biliaire.
* Indications dermatologiques :
Il s’agit d’un antibiotique largement utilisé en première intention en
dermatologie, sur les infections cutanées superficielles présumées
staphylococciques (impétigo, impétiginisation, folliculites) et parfois
dans les poussées d’eczéma atopique en association aux
corticostéroïdes topiques.
La voie générale devrait être choisie en
cas de terrain débilité ou d’infection plus profonde.
Indications non dermatologiques
La voie générale est employée, le plus souvent en association avec
un autre antibiotique, pour les infections autres que rénales et cérébroméningées.
* Indications des traitements topiques :
L’acide fusidique topique (Fucidinet crème et pommade) est très
largement utilisé en dermatologie, sur les infections cutanées
superficielles présumées staphylococciques (impétigo,
impétiginisation, folliculites) et parfois dans les poussées d’eczéma
atopique, en association aux corticostéroïdes topiques.
Citons
également son emploi dans le gel ophtalmique Fucithalmict pour
les infections de l’oeil et de ses annexes.
* Précautions particulières
:
Les résistances bactériennes peuvent apparaître brutalement en un
seul échelon : l’association antibiotique est donc nécessaire dans les
infections graves.
Ces résistances justifieraient aussi, pour certains
auteurs, la limitation de l’emploi de l’acide fusidique topique.
* Effets indésirables
:
Les troubles digestifs sont banals.
Les atteintes hépatiques
(cholestase), les anomalies hématologiques ou les éruptions cutanées
sont exceptionnelles.
Par voie locale, on observe rarement des
sensibilisations de contact.
Rifamycines :
Cette famille d’antibiotiques a révolutionné le traitement des
infections à mycobactéries.
Elle regroupe la rifampicine (Rifadinet,
Rimactant) et la rifabutine (Ansatipinet) à usage systémique, et la
rifamycine (Otofat et Rifamycine Chibrett) d’utilisation topique.
* Mode d’action
:
Les molécules sont bactéricides sur les germes intra- et
extracellulaires par inhibition de la transcription de l’ADN.
* Pharmacocinétique :
La résorption digestive est de 100 % pour la rifampicine, mais
diminue en cas d’ingestion alimentaire, justifiant une prise à jeun.
La demi-vie est de 2 à 3 heures. L’élimination est essentiellement
biliaire.
Pour la rifabutine, la prise alimentaire augmente le temps
d’absorption, et la demi-vie est de 35 à 40 heures.
* Spectre d’action :
La rifampicine est régulièrement active sur les Mycobacterium
tuberculosis, Mycobacterium leprae et les mycobactéries atypiques du
groupe I comme Mycobacterium kansasii.
Elle agit sur le
staphylocoque méti-S, l’Haemophilus influenza, Haemophilus ducreyi,
Neisseria gonorrhoeae et Neisseria meningitidis, Brucella sp., Pasteurella
sp., Rickettsia sp.
La rifabutine a une excellente activité vis-à-vis des
mycobactéries tuberculeuses, lépreuses et atypiques, en particulier
sur Mycobacterium kansasii, sur le complexe Mycobacterium avium
intracellulare et sur Mycobacterium marinum.
* Indications dermatologiques :
Ce sont surtout les traitements des mycobatérioses, typiques ou non.
La rifampicine doit être prescrite en association, en raison du risque
de résistances.
On l’emploie aussi en traitement des dermohypodermites bactériennes nécrosantes et fasciites
nécrosantes, en association à la pénicilline G.
* Indications non dermatologiques :
Pour la rifampicine, ce sont essentiellement les mycobactérioses
extracutanées ou les infections staphylococciques graves.
Pour la rifabutine, il s’agit du traitement des tuberculoses à germes
multirésistants et des traitements préventif et curatif des infections
à mycobactéries atypiques, chez les malades infectés par le VIH.
* Indications des traitements topiques
:
La rifamycine reste utilisée dans les infections oculaires (collyre et
pommade ophtalmique Rifamycine Chibrett) ou auriculaires
(solution Otofat) à germes sensibles.
Contre-indications
Hypersensibilité aux rifamycines, grossesse et allaitement (sauf
nécessité).
Pour la rifampicine : porphyries, antiprotéases (indinavir,
saquinavir), delavirdine.
Pour la rifabutine : insuffisance rénale,
saquinavir.
* Effets indésirables
:
Les troubles hématologiques (neutropénie, thrombocytopénie…),
cutanés (urticaire, syndrome d’hypersensibilité), hépatodigestifs ou
néphritiques sont peu fréquents.
Un syndrome grippal ou « flusyndrome
» peut apparaître sous rifampicine, entre 3 et 6 mois de
traitement.
Avec la rifabutine, apparaissent exanthème, pigmentation
orangée, myalgies, arthralgies, dysgueusies et uvéites, dont les
risques sont majorés par certains médicaments.
Glycopeptides :
Ils comprennent la vancomycine et la teicoplanine.
* Mode d’action :
Ces antibiotiques sont bactéricides par inhibition de la synthèse du peptidoglycane pariétal bactérien.
* Pharmacocinétique
:
Ils nécessitent une administration parentérale.
La demi-vie moyenne
de la vancomycine est de 6 heures, celles de la teicoplanine de plus
de 50 heures.
* Spectre d’action :
Il est ciblé sur les cocci et bacilles à Gram positif, aérobies ou
anaérobies.
Il concerne essentiellement les staphylocoques et les
streptocoques.
*
Indications dermatologiques :
Ce sont les infections graves à streptocoques (parmi lesquelles les dermohypodermites bactériennes nécrosantes en cas d’allergie aux
bêtalactamines) et les infections graves à staphylocoques
multirésistants et/ou chez les sujets allergiques aux bêtalactamines.
* Indications non dermatologiques
:
Il s’agit des infections graves à streptocoques en cas d’allergie aux bêtalactamines, et surtout à staphylocoques méti-R.
* Effets indésirables
:
Pour la vancomycine, citons les thromboses sur perfusion, les
réactions anaphylactoïdes (douleurs musculaires, fièvre, flush,
hypotension voire collapsus), les éruptions cutanées diverses
(parfois dénommées à tort « red man syndrome », dermatose à IgA
linéaire), les troubles digestifs, la néphrotoxicité et l’ototoxicité
(surtout si surdosage).
Les néphrites et troubles hématologiques sont
rares.
Signalons les anomalies hépatiques pour la teicoplanine.
* Contre-indications
:
Hypersensibilité aux glycopeptides, grossesse et allaitement,
nouveau-né.
Nitro-5-imidazolés
:
Le métronidazole (Flagylt, Métronidazole B Braunt) est un produit
de première génération.
Les molécules plus récentes sont
l’ornidazole (Ornidazole Coopert, Tibéral Rochet), le secnidazole
(Flagentylt) et le tinidazole (Fasigynet).
* Mode d’action :
Ces molécules agissent après une réduction intracellulaire donnant
naissance à des produits cytotoxiques qui interagissent avec l’ADN.
Seuls les protozoaires et les bactéries anaérobies possèdent cette
capacité de réduction.
Ceci explique l’étroitesse de leur spectre.
* Pharmacocinétique :
Le métronidazole est utilisable par voie veineuse, orale ou locale.
La
biodisponibilité de la forme orale est de 80 %.
La demi-vie
d’élimination est de 8 heures pour le métronidazole, qui sera
administré en trois prises quotidiennes.
Les dérivés imidazolés de
deuxième génération ont une demi-vie plus longue, permettant une
seule prise quotidienne.
L’insuffisance hépatocellulaire ou rénale
sévère impose un espacement de l’intervalle entre les doses.
* Spectre d’action :
Il concerne les parasites (protozoaires anaérobies) et la plupart des
bactéries anaérobies.
* Effets indésirables :
Ce sont surtout des troubles digestifs banals (anorexie, nausées,
vomissements, diarrhées, goût métallique dans la bouche) et un effet antabuse.
Des manifestations cutanées (prurit, éruptions) ont été
rapportées.
Les leucopénies et les signes neurologiques (céphalées,
vertiges, confusion, convulsions, neuropathies) surviennent en cas
de traitement prolongé et/ou à forte dose.
* Indications dermatologiques :
Ce sont essentiellement les urétrites et vaginites à Trichomonas.
La
rosacée peut aussi être traitée par le métronidazole per os.
En ce cas,
la posologie est de 250 mg deux fois par jour durant 1 mois ; 250 mg
par jour le deuxième mois ; 125 mg par jour pendant 2 à
4 mois.
Indications non dermatologiques
Il s’agit des infections parasitaires et bactériennes à germes sensibles.
* Indications des traitements topiques
:
La rosacée bénéficie des traitements topiques sous forme de gels
(Rosicedt, Rozagelt, Rozext), crèmes (Rozacrèmet, Rozext) ou
émulsion (Rozext), dosés à 0,75 % de métronidazole, à appliquer
deux fois par jour.
L’efficacité est comparable à l’utilisation des cyclines per os.
Les vaginites à Trichomonas sont accessibles aux traitements locaux
sous forme d’ovules.
* Contre-indications :
Citons l’hypersensibilité aux imidazolés, les atteintes neurologiques
(contre-indication relative), la grossesse (pas le métronidazole) et
l’allaitement.
Mupirocine :
*
Mode d’action
:
Cet antibiotique issu de la fermentation de Pseudomonas fluorescens
a une structure originale qui le place en marge des autres classes
pharmacologiques.
Il inhibe la synthèse protéique bactérienne en
bloquant l’intégration de l’isoleucine.
* Spectre d’action
:
Le spectre naturel comprend les Staphylococcus aureus, y compris
méti-R, les Streptococcus des groupes A, B, C, G et viridans.
L’efficacité est comparable à celle de l’acide fusidique topique à 2 %
dans les infections cutanées bénignes : impétigo localisé, folliculites,
furoncles.
Elle est identique voire supérieure à celle des bêtalactamines ou de l’érythromycine orale dans les impétigos.
* Indications dermatologiques :
Son usage est strictement local, sous forme de pommades dosées à
2 % de principe actif.
On obtient par applications locales une activité
antibactérienne persistante, supérieure à celle de l’érythromycine
orale sur Staphylococcus aureus et Staphylococcus pyogenes.
Le Mupidermt est indiqué dans les impétigos et dermatoses
impétiginisées, les folliculites microbiennes et les ecthymas.
La
posologie est de trois applications par jour, sur peau lavée, durant 5
à 10 jours.
Le risque rapide de résistance justifie les précautions
d’emploi actuelles (durée et surface limitées).
La pommade nasale Bactrobant est utilisée pour l’éradication du portage nasal
staphylococcique au cours de la furonculose chronique, la
prévention des auto-infections staphylococciques chez les
hémodialysés, chez les malades porteurs de staphylocoque méti-R,
et au contrôle des épidémies ou états hyperendémiques à
Staphylococcus aureus méti-R en complément des mesures d’hygiène.
* Effets indésirables :
Ils sont strictement locaux : prurit, sensations de brûlures, dermatite
de contact.
Ils seraient surtout dus à l’excipient.
* Précautions d’emploi :
Les traitements doivent concerner des surfaces limitées (moins de
20 % de la surface corporelle) et surtout être discontinus, afin
d’éviter la sélection de souches résistantes.
Phénicolés :
Le chloramphénicol n’étant plus disponible, il ne subsiste que le thiamphénicol.
Cet antibiotique ne doit être utilisé qu’en cas de
nécessité.
* Mode d’action :
Il agit par inhibition de la synthèse protéique par les ribosomes
bactériens.
* Pharmacocinétique
:
L’absorption est bonne, rapide.
La diffusion est large.
Avec une
demi-vie de 3 heures, l’élimination est surtout urinaire.
* Spectre d’action :
Le spectre naturel comprend les streptocoques, gonocoques,
méningocoques, Listeria, Salmonella, Shigella, Pasteurella, Brucella,
Haemophilus, Chlamydia, Mycoplasma, Rickettsia et anaérobies.
* Indications dermatologiques
:
Ce sont les urétrites gonococciques et non gonococciques à germes
résistant aux autres antibiotiques.
* Indications non dermatologiques :
Actuellement, le thiamphénicol est réservé à certaines infections
neuroméningées, en particulier les abcès cérébraux.
* Effets indésirables :
Il s’agit d’une toxicité médullaire touchant les trois lignées,
réversible mais parfois grave, nécessitant une surveillance
hématologique.
* Contre-indications :
On cite l’insuffisance rénale, les antécédents d’insuffisance
médullaire, l’allaitement.